Le licenciement pour inaptitude, sans cause réelle et sérieuse, ouvre droit à l’indemnité compensatrice de préavis

Jurisprudence
Paie Indemnité de licenciement

Le salarié inapte dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d'un manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement, a droit à l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L. 1234-5 du code du travail.

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Un salarié est engagé en qualité d'aide cuisinier, le 23 janvier 2010, licencié le 8 octobre 2010, puis engagé à nouveau le 1er avril 2012.

Il est déclaré par le médecin du travail, à l'issue de deux examens médicaux, inapte à tous postes dans l'entreprise. 

Il est finalement licencié le 19 août 2013 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. 

Mais il décide de saisir la juridiction prud’homale, estimant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et demande à ce titre le paiement d’une indemnité compensatrice de préavis.

Par arrêt du 3 juillet 2019, la cour d'appel de Versailles reconnaît que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, mais rejette la demande du salarié vis-à-vis de l’indemnité compensatrice de préavis.

A tort selon la Cour de cassation, qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel sur ce point, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée. 

La Cour de cassation estime en effet que : 

  • Le salarié inapte dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d'un manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement ;
  • A droit à l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L. 1234-5 du code du travail. 

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour 

Vu l'article L. 1234-5 du code du travail et l'article L. 1226-2 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 :

  1. Il résulte de ces textes que le salarié inapte dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d'un manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement a droit à l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L. 1234-5 du code du travail.
  2. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, l'arrêt retient qu'aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, en cas de licenciement d'un salarié déclaré inapte à la suite d'une maladie ne relevant pas du régime des risques professionnels, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement, que le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9, et que par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.
  3. En statuant ainsi, alors qu'elle avait dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [N] de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 3 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°21-10525

En cas de licenciement pour inaptitude, des dispositions particulières s’appliquent en matière d’indemnité compensatrice de préavis.

Nous les rappelons brièvement ci-après, tout en informant nos lecteurs qu’une fiche pratique aborde cette thématique avec de très nombreux détails. 

Préavis en cas d’inaptitude et impossibilité de reclassement

Compte tenu de l’inaptitude du salarié et de l’impossibilité de reclassement (ou de refus) aucun préavis n’est à effectuer par le salarié.

2 situations sont néanmoins à envisager :

Situation 1 : inaptitude résultant d’une maladie professionnelle ou consécutive à un accident du travail 

Dans ce cas précis, le salarié ne doit pas effectuer de préavis. 

Il doit percevoir néanmoins :

  • Une indemnité d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis (article L 1226-14) ;
  • Cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité compensatrice de préavis (Cour de cassation du 15/06/1999 arrêt 97-15328) ;
  • De ce fait, le salarié n’est pas en droit de demander le paiement de l’indemnité compensatrice de préavis prévue par la Convention collective ;
  • L’indemnité versée n’étant pas une indemnité compensatrice de préavis légale (même si la valeur est identique), la date de rupture du contrat de travail n’est pas repoussée ;
  • L’indemnité de licenciement sera donc calculée sur l’ancienneté acquise à la notification ;
  • L’indemnité d’une valeur égale à l’indemnité compensatrice de préavis sera calculée sur la base des 3 derniers mois de salaire (article L 1226-16 du Code du travail) ;
  • Le montant de cette indemnité ne doit pas être pris en compte dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés.

Situations particulières

Les 3 seuls cas pour lesquels le salarié pourrait bénéficier d’une indemnité compensatrice de préavis (et pas d’une indemnité dont le montant est égal au montant de l’indemnité légale de préavis) sont : 

  1. L’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement ;
  2. L’employeur n’a pas repris le paiement du salaire alors que le délai d’un mois est écoulé ;
  3. Le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Situation 2 : inaptitude après une maladie ou un accident non professionnel 

Ainsi, lorsqu’un salarié fait l’objet d’un licenciement pour une inaptitude qui n’a pas d’origine professionnelle, le Code du travail indique que :

  • Le préavis n’est pas exécuté ;
  • Le contrat de travail est donc rompu à la notification du licenciement ;
  • Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l’indemnité ;
  • Aucune indemnité compensatrice de préavis n’est versée.

Article L1226-4

Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 47

Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.

En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9. Par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.

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