Le Conseil d'Etat a rendu son avis sur le projet de loi portant mesures d'urgence sur le fonctionnement du marché du travail

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Droit du travail Projet de loi

Le Gouvernement a décidé de rendre public l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi portant diverses mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail.

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Définition du corps électoral pour les élections aux CSE

Le Conseil d’Etat rappelle que la Cour de cassation interprète les dispositions de l’article L. 2314-18 du code du travail, qui définissent le corps électoral pour les élections aux comités sociaux et économiques, et celles de l’article L. 2314-19, qui déterminent les personnes éligibles à ces mêmes élections, comme impliquant que « ne peuvent ni exercer un mandat de représentation du personnel ni être électeurs les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel. »

Dans sa décision n° 2021-947 QPC, le Conseil constitutionnel, qui n’avait été saisi que des dispositions de l’article L. 2314-18, a estimé qu’« en privant des salariés de toute possibilité de participer en qualité d'électeur à l'élection du comité social et économique, au seul motif qu'ils disposent d'une telle délégation ou d'un tel pouvoir de représentation », ces dispositions, telles qu’interprétées par la jurisprudence constante des juridictions judiciaires, « portent une atteinte manifestement disproportionnée au principe de participation des travailleurs ». Il a, en conséquence, décidé d’abroger l’article L. 2314-18, dans sa rédaction actuelle, et reporté au 1er novembre 2022 les effets de cette abrogation.

Le Gouvernement propose de rétablir l’article L. 2314-18 à compter du 1er novembre prochain, en y précisant que désormais l’ensemble des salariés ont la qualité d’électeur, dès lors qu’ils remplissent les conditions posées par cette disposition en termes notamment d’âge ou d’ancienneté dans l’entreprise.

Il propose également de modifier l’article L. 2314-19 pour y expliciter, dans la lignée de la jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, que les salariés assimilables à l’employeur en raison des attributions qui leur ont été déléguées, ou qui représentent l’employeur devant les instances représentatives du personnel, restent inéligibles.

Le Conseil d’Etat estime que la modification à la marge de l’article L. 2314-18, rapprochée de l’article L. 2314-19 dans sa rédaction elle-même modifiée, est de nature à lever toute difficulté d’ordre constitutionnel s’agissant de la définition du corps électoral, et à assurer le respect de l’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision n° 2021-947 QPC. 

Il estime, par ailleurs, que, s’agissant de l’éligibilité, la distinction opérée ne méconnaît pas le principe d’égalité ni les exigences du huitième alinéa du Préambule de 1946, compte tenu de l’incidence que les attributions exercées ou les fonctions occupées seraient, par elles-mêmes, de nature à avoir sur le bon fonctionnement des comités sociaux et économiques. Le critère utilisé apparaissant clair et précis, la mesure ne se heurte à aucun autre obstacle juridique.

VAE

Afin de lever toute ambiguïté et d’éviter une rupture d’égalité, le Conseil d’Etat estime nécessaire de compléter le projet du Gouvernement pour préciser que l’élargissement envisagé du champ des personnes éligibles à la validation des acquis de l’expérience ne concerne pas seulement les « proches aidants » au sens de l’article L. 113-1-3 du code de l’action sociale et des familles, c’est-à-dire les proches apportant une aide à une personne âgée dans l’accomplissement des actes de la vie quotidienne, mais aussi les « aidants familiaux » au sens de l’article L. 245-12 du même code, qui apportent une aide à une personne handicapée. 

Le Conseil d’Etat estime qu’il y a lieu de préciser que les périodes de mise en situation professionnelle dont le projet de loi prévoit la prise en compte au titre de l’expérience antérieure du candidat sont celles effectuées dans le cadre du dispositif d’insertion mentionné à l’article L. 5135-1 du code du travail. Les périodes de même nature effectuées dans le cadre d’une formation initiale ou continue sont en effet déjà susceptibles d’être légalement prises en compte.

Le projet de loi prévoit par ailleurs d’élargir la vocation des dispositifs d’accompagnement des candidats à la valorisation des acquis de l’expérience. En l’état du droit, il résulte de l’article L. 6423-1 du code du travail que « Toute personne dont la candidature a été déclarée recevable (…) peut bénéficier d'un accompagnement dans la préparation de son dossier et de son entretien avec le jury ». Le Gouvernement entend faire débuter cet accompagnement dès la constitution du dossier de recevabilité, afin de tenir compte des difficultés rencontrées par de nombreuses personnes dans cette étape du parcours de validation, qui compromettent la qualité de leur dossier, voire font obstacle à ce qu’elles se portent candidates.

Le Conseil d’Etat relève que cette mesure, de nature à faciliter substantiellement l’accès aux procédures de valorisation des acquis de l’expérience, aura de manière générale une incidence sur les organismes chargés du financement et de la prise en charge des frais afférents. 

Elle aura un impact particulier sur les régions, qui sont chargées, en vertu du 4° de l’article L. 6121-1 du code du travail, d’organiser l'accompagnement des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi qui sont candidats à la validation des acquis de l'expérience, et de participer à son financement. Cette compétence est rappelée à l’article L. 6423-1 du même code. 

Le Conseil d’Etat constate toutefois que le projet de loi ne crée pas de nouvelle prestation, l’accompagnement étant déjà une composante de la compétence régionale en matière d’« accès à la formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi ou d'une nouvelle orientation professionnelle », mentionnée au premier alinéa de l’article L. 6121-1 du code du travail.

Le projet de loi n’étend pas davantage le champ des bénéficiaires de l’accompagnement et, dès lors qu’il se limite à permettre un accompagnement plus précoce des publics concernés, ne peut être regardé comme modifiant la nature ou l’objet de la compétence des régions en la matière.

Par suite, si la mesure envisagée modifie les conditions d’exercice de cette compétence, elle ne constitue pas une « extension » de compétence au sens de l’article 72-2 de la Constitution, qui supposerait que la loi l’accompagne de ressources dédiées.

Référence

Avis du CE du 5 septembre 2022.

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