Aucune rupture de la période d’essai en l’absence d’un contrat de travail qui l’indique

Jurisprudence
Paie Période d’essai

La période d'essai et son éventuel renouvellement ne se présument pas. En l’absence de contrat de travail stipulant une période d’essai, la cour d’appel ne saurait considérer que le salarié avait rompu le contrat à son initiative durant « une période d’es

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Une salariée est engagée le 11 février 2019 en qualité de chauffeur livreur.

Le 3 mars 2019, elle indique à son employeur qu'elle mettait fin à la période d'essai, puis saisit la juridiction prud'homale afin de voir rectifier l'attestation Pôle emploi remise par l'employeur, qui indiquait une « rupture de période d'essai à l'initiative du salarié ».

Pour cela, la salariée met en avant le fait que les parties n’avait pas signé de contrat de travail mentionnant la période d’essai à laquelle elle serait soumise. 

La cour d’appel de Chambéry, par arrêt du 26 novembre 2020, retient que « la salariée a rompu le contrat durant la période d'essai ».

La Cour de cassation ne partage pas du tout l’avis de la cour d’appel, rappelant pour cela des principes fondamentaux encadrant la période d’essai (et son éventuel renouvellement). 

Vu l'article L. 1221-23 du code du travail :

  • La période d'essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail ;
  • Ayant été constaté l’absence de contrat de travail stipulant une période d'essai ;
  • De sorte que la cour d’appel ne pouvait considérer que la rupture du contrat avait été rompu par le salarié durant une période d’essai.

Extrait de l’arrêt : 



Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-23 du code du travail :
5. Aux termes de ce texte, la période d'essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail.
6. Pour condamner l'employeur à délivrer à la salariée une attestation Pôle emploi rectifiée s'agissant du motif de la rupture, l'arrêt retient que la salariée a rompu le contrat durant la période d'essai.
7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les parties n'avaient pas signé de contrat de travail stipulant une période d'essai, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne par voie de conséquence la cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur à payer à la salariée des dommages-intérêts, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Cour de cassation du , pourvoi n°21-18326

La période d’essai, que ce soit son existence ou son renouvellement, est à l’origine de nombreux contentieux.

Nous profitons de la présente affaire pour rappeler quelques notions importantes à ce sujet, ces informations sont issues d’une fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique, et à retrouver au lien suivant : 

Le décompte de la période d’essai

Le décompte doit se faire en :

  • Jours calendaires si la période d’essai est exprimée en jours ;
  • En semaines civiles si la période d’essai est exprimée en semaines ;
  • En mois civils si la période d’essai est exprimée en mois.

Un arrêt récent de la Cour de cassation (arrêt 28/04/2011, pourvois 09-40464 et 09-72165) précise que cette méthode calendaire s’applique automatiquement sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires.

« Sauf disposition conventionnelle ou contractuelle contraire, toute période d’essai, qu’elle soit exprimée en jours, en semaines ou en mois, se décompte de manière calendaire. »

Le point de départ de la période d’essai est fixé au premier jour de la prise de fonction par le salarié.

Exemples 

  1. Période d’essai de 2 mois qui débute le 15/06/2009 se termine le 14/08/2009 à minuit.
  2. Période d’essai de 45 jours qui débute le 01/07/2009 se termine le 15/08/2009 à minuit 

Lorsqu’une période expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié, elle n’est pas prolongée jusqu’au premier jour ouvrable suivant !!

Renouvellement de la période d’essai 

Tout comme la période d’essai, le renouvellement de cette dernière ne se présume pas.

L’employeur qui souhaite renouveler une période d’essai doit avoir indiqué cette possibilité sur le contrat de travail.

La période d’essai peut être renouvelée une fois et pourra alors atteindre les valeurs maximales suivantes : 

Catégories personnel 

Durée initiale maximum

Durée maximum avec 1 renouvellement

Ouvrier et employé

2 mois

4 mois

TAM

3 mois

6 mois

Cadres

4 mois

8 mois

Article L1221-21

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)

La période d'essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit. Cet accord fixe les conditions et les durées de renouvellement.

La durée de la période d'essai, renouvellement compris, ne peut pas dépasser :

1° Quatre mois pour les ouvriers et employés ;

2° Six mois pour les agents de maîtrise et techniciens ;

3° Huit mois pour les cadres.

Article L1221-23

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)

La période d'essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail. 

Sous réserve d’un accord et d’une mention sur le contrat de travail 

Nota :

Le renouvellement de la période d’essai n’est possible que dans le cas :

  • Où un accord de branche étendu le prévoit ;
  • Et que le renouvellement soit expressément stipulé dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail.

Dans le cas inverse... 

Situation

Conclusion

L’accord de branche n’autorise pas le renouvellement d’une période d’essai

Le renouvellement est impossible, la LMMT soumet cette possibilité à l’existence d’un accord collectif de branche étendu.

La convention collective ne prévoit pas le renouvellement 

De la même façon, si une convention collective ne prévoit pas le renouvellement de la période d’essai, la clause du contrat de travail prévoyant son renouvellement est alors nulle.

Cour de cassation 25/02/2009 pourvoi 70-40.155

Renouvellement de la période d’essai aussi par mail 

En réponse à une question posée par un parlementaire, le Ministre du travail donne l’indication suivante :

"Un message électronique est donc recevable au même titre qu'un courrier, dès lors que l'accord y est exprimé dans des termes clairs et non équivoques".

Toutefois, le ministre du Travail prévient que cette disposition n’est pas applicable dans le cas particulier où la convention collective prévoirait des modalités spécifiques en matière de renouvellement de la période d’essai.

Réponse publiée au JO de l'Assemblée nationale du 1er mars 2011

Obtenir un accord exprès du salarié 

La circulaire de la DGT du 17 mars 2009, précise qu’outre la condition de couverture d’un accord de branche étendu, le renouvellement nécessite l’accord des 2 parties.

Extrait circulaire DGT 2009-5 du 17/03/2009

La période d’essai initiale peut être renouvelée une fois à la condition qu’un accord de branche étendu le prévoit expressément (article L. 1221-21) et avec l’accord des deux parties.

La Cour de cassation, dans son arrêt du 25 novembre 2009, indique que cet accord doit :

  • Être exprès ;
  • Résulter d’une volonté claire et non équivoque ;
  • Intervenir au cours de période initiale. 

Elle considère à cette occasion que le seul « contreseing » du salarié apposé sur la lettre adressée par son employeur restait équivoque et ne manifestait pas clairement son acceptation du renouvellement ou de la prolongation de la période d'essai que la société entendait provoquer. 

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 25 novembre 2009 N° de pourvoi: 08-43008 

Un arrêt de la Cour de cassation du 8/07/2015 confirme cette position.

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 8 juillet 2015 
N° de pourvoi: 14-11762

Conséquence d’un renouvellement non conforme 

Si le renouvellement n’a pas été obtenu dans les règles précitées, toute rupture du contrat de travail (que l’employeur imagine faire dans le cadre d’une rupture de période d’essai) doit en fait s’analyser en un licenciement… sans cause réelle et sérieuse ! 

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