Une promesse d’embauche non respectée : versement de dommages et intérêts !

Jurisprudence
Contrat de travail

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Contexte de l'affaire

Une salariée est licencié le 6/07/2006 à la suite de la fermeture de son établissement. 

Par lettre du 7/04/2006, une autre entreprise (repreneur d’une partie des activités du site de l’établissement précité), adresse à la salariée une proposition d’embauche pour un contrat CDI et une prise de fonction à compter du 26/06/2006. 

Cet engagement n’ayant pas été suivi d’exécution, la société repreneuse indique à la salariée, par courrier du 8/06/2006 qu’elle ne donnait pas suite à la promesse d’embauche. 

La personne visée par cet engagement décide alors de saisir la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts. 

Dans un premier temps, la Cour d’appel déboute la demanderesse. 

Les juges estiment en effet, que la proposition d’embauche devait s’analyser en une offre d’embauche et non une promesse de contrat.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt énonce que la proposition d'embauche du 7 avril 2006 s'analyse en une offre et non une promesse de contrat ; que cette offre non encore acceptée était, en l'absence de limitation expresse dans le temps, révocable dans un délai raisonnable qui, au regard des circonstances de l'espèce caractérisées par des embauches à réaliser rapidement pour assurer la reprise d'activité, a été respecté

La Cour de cassation n’est pas du même avis.

Les juges cassent et annulent l’arrêt de la Cour d’appel, renvoyant les 2 parties devant une nouvelle Cour d’appel. 

Ils estiment en effet, que l’écrit précisant l’emploi proposé et la date d’entrée en fonction constitue réellement une promesse d’embauche. 

Ils estiment également que le non-respect de la promesse d’embauche engage l’entreprise à verser des dommages et intérêts. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors que l'écrit qui précise l'emploi proposé et la date d'entrée en fonction constitue une promesse d'embauche obligeant le promettant envers le bénéficiaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°11-10486

Commentaire de LégiSocial

Ce n’est pas la première fois que les juges de la Cour de cassation se « penchent » sur le problème des promesses d’embauche non respectées, rappelons à ce sujet quelques affaires comme suit : 

Promesse d’embauche = engagement de l’employeur

Une promesse d’embauche, même verbale, a été considérée comme un engagement liant l’employeur à la personne sur le point d’être engagée.

Cour de cassation du 12/04/1995, arrêt 91-44249 FD

Par contre, la Cour de cassation dans son arrêt du 12/07/2006, a considéré qu’une promesse d’embauche ne mentionnant ni l’emploi, la rémunération, date d’embauche ou temps de travail n’avait pas valeur d’engagement et ne liait pas le futur employeur et le futur salarié.

Cour de cassation du 12/07/2006, pourvoi 04-47938

Promesse d’embauche établie avec des moyens « modernes »

Une promesse d’embauche adressée par télécopie a été reconnue comme valable et à ce titre comme un engagement de l’employeur.

Cour de cassation du 16/05/2007 arrêt 06-40665 FD

Une promesse d’embauche par mail semble être reconnue, car le code civil indique dans son article L 1316-1 que :

Article 1316-1

Créé par Loi n°2000-230 du 13 mars 2000 - art. 1 JORF 14 mars 2000

L'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité.

Promesse d’embauche par… téléphone !

Une promesse d’embauche par téléphone a été reconnue par la Cour d’appel.

Dans cette affaire, les juges ont considéré que la concomitance des deux évènements suivants prouvait la réalité de la promesse :

  • Le fait que l’employeur avise son futur salarié qu’il va l’embaucher suite à des tests réussis et qu’il peut démissionner de son emploi actuel ;
  • La date de démission de l’ancien poste.

Cour d’appel du 6/01/1987, arrêt 2216/86

Promesse non tenue par l’employeur : les conséquences.

Les conséquences sont importantes et varient selon la nature du contrat concerné. 

Conséquence pour un contrat CDI :

Le non-respect de la promesse d’embauche est considéré comme un licenciement.

Cour de cassation du 02/02/1999, arrêt 95-45331

La promesse d’embauche est un contrat de travail, ne pas tenir cet engagement s’analyse comme une rupture pouvant ouvrir droit à versement de dommages-intérêts

Cour de cassation 16/12/2009 arrêt 08-43023 FD

Rompre une promesse d’embauche, s’analyse en une rupture du contrat avant son exécution qui oblige l’employeur à verser une indemnité compensatrice de préavis.

Cour de cassation 04/12/2001, arrêt 91-44288 D

Conséquence pour un contrat CDD :

Si le contrat est rompu avant même le début d’exécution du contrat, l’employeur se trouvera dans l’obligation de verser des dommages intérêts dont le montant minimum correspond à : 

  • Salaires de la totalité du contrat CDD ;
  • Plus l’indemnité de précarité calculée sur les mêmes salaires.

Cour de cassation 26/09/2002 pourvoi numéro 00-42581

Rupture promesse d’embauche= licenciement abusif

La rupture de la promesse d’embauche a même été considérée comme un licenciement abusif, ouvrant droit pour la personne concernée au paiement ;

  • De dommages et intérêts ;
  • Et d’une indemnité compensatrice de préavis. 

Cour de cassation 15/12/2010 Arrêt 08-42.951

Nous avons consacré un article à ce sujet, que vous pouvez retrouver en cliquant ici.

Et pour l’affaire présente ?

Le non-respect de la promesse d’embauche entraine selon les juges, le paiement de dommages et intérêts estimés dans l’affaire présente à… 2.500 € !

Extrait de l’arrêt :

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Y… à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros