Taux d’alcoolémie incertain : le doute profite au salarié !

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Indemnité de licenciement

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Cet article a été publié il y a 12 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

C’est en tout cas ce que l’on pourrait conclure de l’affaire jugée par la Cour d’appel de Caen récemment. 

L’affaire concernée

Un salarié est engagé le 12/11/1989 en qualité de conducteur receveur par une compagnie assurant le transport par bus de ces voyageurs au sein d’une grande agglomération.

Depuis 2001, le salarié occupait le poste « d’agent commercial de conduite-vérificateur ».

Par lettre du 26/07/2006, son employeur lui notifie son licenciement pour faute grave.

Contestant son licenciement, le salarié saisit le 5/04/2007 le conseil de prud'hommes pour faire valoir ses droits. 

Motif du licenciement 

L’employeur reproche à son salarié d’avoir exercé son activité professionnelle sous l’emprise de l’alcool.

En effet, le 4/07/2006 alors que le salarié était en service, un contrôle positif à l’alcootest est pratiqué. 

Ainsi que le rappellent les juges de la Cour d’appel dans leur jugement, la lettre de licenciement reprend même les différents dosages réalisés. 

qu'un premier contrôle, réalisé à 14 heures 20 au terminus de la ligne par Monsieur Y, responsable de Monsieur X, a révélé un taux de 1.32 g/l, qu'un second contrôle, réalisé une heure plus tard dans les locaux de la compagnie, [...] en présence de Mademoiselle W et de Monsieur Z, a révélé un taux de 1,22 g/l et qu'il a ensuite été conduit à la clinique …  pour un examen sanguin. 

La défense du salarié 

Pour sa défense, le salarié affirme n’avoir pas consommé d'alcool le jour où il a été contrôlé mais avoir, ce même jour, absorbé une double dose de médicaments…… contre l'alcool !! 

La décision de la Cour d’appel 

Pour les juges de la Cour d’appel de nombreux doutes subsistent sur l’alcoolémie du salarié licencié. 

Alcoolémie vérifiée par l’employeur 

Les juges considèrent que l’employeur n’apporte suffisamment de précisions pour que les taux d’alcoolémie puissent être retenus contre le salarié.

Sont visés notamment les éléments suivants :

  • Les modalités techniques de deux contrôles ne sont pas précisées ;
  • Le type d’appareil utilisé n’est pas précisé ;
  • Il n’est pas indiqué si ces appareils avaient été utilisés ou vérifiés conformément aux règles légales. 

Il n'est apporté par la société ….., que ce soit dans la lettre de licenciement elle-même, dans ses écrits de procédure ou dans les pièces qu'elle verse aux débats, aucune précision sur les modalités techniques de deux contrôles d'alcoolémie effectués par ses agents sur la personne de Monsieur X le 4 juillet 2006 qui ont révélé des taux successifs de 1,32 g/l et de 1,22 g/l.

La cour ignore en particulier le type d'appareil utilisé pour ces contrôles et, surtout, si celui ou ceux alors utilisés avaient, avant utilisation, été vérifiés conformément aux dispositions réglementaire applicables en la matière et, notamment, à l'arrêté du 8 juillet 2003 relatif au contrôle des éthylomètres.

Les seuls chiffres prétendument indicateurs du taux d'alcoolémie de Monsieur X relevé le 4 juillet 2006 énoncés à la lettre de licenciement ne présentent donc pas un degré de fiabilité suffisante pour que, sur la seule base de ceux-ci, il puisse être admis qu'ils établissent la réalité de l'alcoolémie positive de celui-ci qui constitue le motif de son licenciement. 

Contrôle sanguin 

Sans rentrer dans trop de détails, nous pouvons simplement indiquer que le contrôle sanguin semble ne pas avoir été effectué dans les meilleures conditions requises. 

Ce même 4 juillet 2006, Monsieur X a été invité par son employeur à se présenter au laboratoire d'analyses médicales et biologiques …. où, à 15 heures 48, il a été soumis à un prélèvement sanguin à partir duquel ont seules été effectuées des recherches en hématologie et en enzymologie dont les résultats ont été communiqués à son médecin traitant, le Docteur …, laquelle les a ainsi commentés : 'bilan sanguin très évocateur d'une consommation chronique de boissons alcoolisées, mais absence d'arguments en faveur d'une éthylémie aigüe pour cette date. Seule l'éthylémie réalisée ce jour aurait pu confirmer la consommation d'alcool ce jour précis' 

Le doute persiste 

Pour la Cour d’appel, le doute persiste et doit profiter au salarié en l’occurrence. 

En conséquence, le doute persistant sur le taux d'alcoolémie effectif relevé pour ce salarié, le licenciement fondé sur ces mesures ne pouvait qu'être considéré comme sans cause réelle et sérieuse et ouvrir droit à réparation. 

Conséquences financières 

Le salarié licencié a obtenu le paiement de plus de 30.000 € au titre des dommages et intérêts auxquels s’ajoutent l’indemnité de licenciement, de préavis et de congés payés.  

 Précisons que la décision de la Cour d’appel est contraire à celle du Conseil des prud’hommes qui dans un premier temps avait débouté le salarié de toutes ses demandes. 

- 22.000 euro à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 5.234,08 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 523,41 euro au titre des congés payés y afférents,

- 5.539,03 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; 

Références  

Cour d'Appel de Caen n° 09/01325 du 27 mai 2011

Conseil de prud'hommes Caen du 20 avril 2009 n° 07/00285

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