Ne pas dater les faits reprochés ne rend pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse

Jurisprudence
Licenciement

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Une salariée est engagée en qualité de vendeuse en boulangerie le 2 octobre 2004.

Elle est licenciée pour faute grave par lettre du 17 décembre 2008.

Son employeur lui reproche en effet d’avoir offert à des clients, à l’insu de son employeur, des marchandises vendues par la boulangerie sans que ces derniers en acquittent le prix.

La salariée saisit la juridiction prud’homale, considérant que le licenciement doit être considéré sans cause réelle et sérieuse, au motif qu’aucune date n’est indiquée sur la lettre de licenciement concernant les faits qui lui sont reprochés, pas plus que l'identité des clients concernés. 

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison à la salariée, invalidant ainsi le licenciement. 

Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis.

Les juges cassent et annulent l’arrêt de la cour d’appel, considérant que la datation dans la lettre de licenciement des faits invoqués n’est pas nécessaire.

Les griefs reprochés à la salariée étaient de nature à motiver son licenciement pour faute grave, d’autant plus que les fait étaient à la fois précis et matériellement vérifiables. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi alors d'une part, que la datation, dans la lettre de licenciement, des faits invoqués n'est pas nécessaire et d'autre part, que le grief tiré du fait d'avoir offert à des clients, à l'insu de l'employeur, des marchandises vendues par la boulangerie sans que ces derniers en acquittent le prix, était précis et matériellement vérifiable, la cour d'appel à laquelle il appartenait de vérifier le caractère réel et sérieux du licenciement a violé les textes susvisés ; 
PAR CES MOTIFS : 
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-13719

Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques notions importantes concernant la notification du licenciement. 

Notification par lettre recommandée selon le Code du travail

  • L’employeur doit respecter le délai de deux jours ouvrables après la date prévue de l’entretien au licenciement auquel le salarié a été convoqué ; 

Article L1232-6

Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.

Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.

  • Pour un licenciement disciplinaire, le délai maximum est d’un mois (pour un autre motif le code du travail n’impose pas de délai maximum).

Article L1332-2

Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 48

Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.

Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.

La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé.

Exemple concret :

Date de l’entretien

Les 2 jours ouvrables 

Date d’expédition lettre de licenciement

Lundi

Mardi +Mercredi

Jeudi

Mardi

Mercredi+ Jeudi

Vendredi

Mercredi

Jeudi+ Vendredi

Samedi

Jeudi 

Vendredi+ Samedi+ dimanche

Lundi

Vendredi

Samedi+ dimanche+ lundi

Mardi

Samedi

Dimanche+ lundi+ Mardi

Mercredi

  

Date d’envoi notification licenciement

C’est la date d’envoi de la lettre recommandée avec avis de réception qui marque la rupture du contrat de travail. 

C’est à cette date que l’employeur doit évaluer : 

  1. Si le salarié peut prétendre au versement d’une indemnité de licenciement compte tenu de son ancienneté. C’est donc à cette date que l’on évaluera s’il justifie d’une ancienneté minimum de 1 an (quand bien même il aurait une ancienneté de 1 an et plus au terme de la période de préavis) ;
  2. Si le salarié peut prétendre à un préavis et quelle en est sa durée.

La modification apportée par le décret du 20/01/2012

Décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012 relatif à la résolution amiable des différends. JORF n°0019 du 22 janvier 2012 page 1280

Le décret indique que l’article 667 du code de procédure civile est désormais complété par un alinéa prévoyant que la notification en la forme ordinaire (sous-entendu par lettre remise en main propre) peut être faite, y compris si la loi ne prévoit la notification que par la voie postale (comme en cas de licenciement).

Article 36

L'article 667 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La notification en la forme ordinaire peut toujours être faite par remise contre émargement ou récépissé alors même que la loi n'aurait prévu que la notification par la voie postale. » 

La version définitive du Code de procédure civile est désormais la suivante :

Article 667

Modifié par Décret n°2012-66 du 20 janvier 2012 - art. 36

La notification est faite sous enveloppe ou pli fermé, soit par la voie postale, soit par la remise de l'acte au destinataire contre émargement ou récépissé.

La notification en la forme ordinaire peut toujours être faite par remise contre émargement ou récépissé alors même que la loi n'aurait prévu que la notification par la voie postale.

Le décret confirme que cette nouvelle disposition entre en vigueur le lendemain de la publication au JO, soit le 23/01/2012

Les conséquences ? 

Cette disposition met un cadre légal à des pratiques assez couramment rencontrées dans des contentieux entourant les licenciements.

La Cour de cassation dans son arrêt du 7 juillet 2010 confirme que le licenciement n’est pas obligatoirement notifié par lettre recommandée avec avis de réception. 

Cour de cassation du 07/07/2010 pourvoi E 08-45.139 arrêt 1454 F-D

  

Attention à la transaction ! 

Il est utile de rappeler qu’une notification d’un licenciement par lettre remise en main propre interdit par la suite toute procédure de transaction.

Cour de cassation du 07/07/2010 pourvoi E 08-45.139 arrêt 1454 F-D

Nous avons consacré un article à ce sujet, que vous pouvez retrouver avec le lien suivant.

La première présentation de la lettre recommandée

C’est la date de 1ère présentation de la LR+AR qui marque le début du préavis.

Article L1234-3

La date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement au salarié fixe le point de départ du préavis. 

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