Quel salaire brut verser lorsque le contrat de travail indique une « rémunération nette » ?

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Paie Contrat de travail

Indiquer une rémunération nette sur un contrat de travail peut avoir des conséquences sur le salaire brut que le gestionnaire de paie doit considérer. La Cour de cassation vient d’apporter un éclairage à ce sujet…

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Présentation de l’affaire

Un salarié est engagé, à compter du 23 février 2004, suivant deux contrats à durée déterminée successifs, puis par contrat à durée indéterminée, le 25 février 2005, en qualité d'agent d'entretien. 

Il est licencié le 26 décembre 2016. 

Le salarié saisit la juridiction prud'homale, le 16 novembre 2017, afin d'obtenir la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes et indemnités au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail. 

Il réclame notamment un rappel de salaires compte tenu du fait que son contrat de travail indiquait qu’il « percevrait chaque mois un salaire net forfaitaire de 1 653 euros ». 

Selon l’employeur, cela ne constituait qu’une « erreur de plume », et qu’il convenait dés lors de considérer que le montant de 1.653 € s’entendait en « valeur brute ».

Arrêt de la cour d’appel

La cour d'appel de Douai, par arrêt du 26 mars 2021, déboute le salarié de sa demande. 

Pour cela, elle argument en indiquant que :

  • La mention du salaire en net dans le contrat de travail constitue une erreur de plume,
  • Ce qui a été compris comme tel par les deux parties durant les 13 années de leur collaboration ;
  • Et que l'erreur matérielle n'étant pas créatrice de droit, le salarié ne pouvait prétendre à des rappels de salaires ou complément d'indemnité de licenciement ni davantage solliciter des dommages-intérêts à l'encontre de son ancien employeur, aucun comportement fautif n'étant mis en évidence.

En d’autres termes, la cour d’appel considérait (tout comme l’employeur) que le montant de 1.653 € s’entendait comme une valeur brute. 

Arrêt de la Cour de cassation 

Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel, dont elle casse et annule l’arrêt, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Douai autrement composée. 

Selon elle, en application des dispositions légales :

  • La rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord.

Dans la présente affaire, il n’avait pas été constaté que :

  • Le salarié avait accepté de manière claire et non équivoque une modification de la rémunération contractuellement prévue. 

En d’autres termes, en appliquant une rémunération brute de 1.653 €, nonobstant l’indication d’une rémunération nette sur le contrat de travail pour le même montant, l’employeur avait modifié de façon unilatérale le contrat de travail de son salarié.

L’employeur devait donc verser au salarié :

  • Une rémunération brute suffisante pour aboutir à une rémunération nette à hauteur de 1.653 €, respectant ainsi ses obligations contractuelles.

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
5. Il résulte de la combinaison de ces textes que la rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord.
6. Pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient que la mention du salaire en net dans le contrat de travail constitue une erreur de plume, ce qui a été compris comme tel par les deux parties durant les treize années de leur collaboration et que l'erreur matérielle n'étant pas créatrice de droit, le salarié ne peut prétendre à des rappels de salaires ou complément d'indemnité de licenciement ni davantage solliciter des dommages-intérêts à l'encontre de son ancien employeur, aucun comportement fautif n'étant mis en évidence.
7. En statuant ainsi, alors que les contrats de travail successifs du salarié stipulaient qu'en rémunération de ses services, il percevrait chaque mois un salaire net forfaitaire de 1 653 euros, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que le salarié avait accepté de manière claire et non équivoque une modification de la rémunération contractuellement prévue, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [H] de sa demande en rappel de salaires sur la base d'un salaire brut de 2 146,75 euros, de sa demande subséquente en paiement d'un reliquat d'indemnité de licenciement fondée sur ce salaire de référence et de sa demande en dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et en ce qu'il dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens d'appel, l'arrêt rendu le 26 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ;

Références

Cour de cassation - Chambre sociale N° de pourvoi : 21-17.171 ECLI:FR:CCASS:2022:SO01363 Non publié au bulletin

Solution : Cassation partielle Audience publique du mercredi 14 décembre 2022 Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 26 mars 2021

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