La clause de mobilité ne doit pas servir à sanctionner un salarié

Jurisprudence
Contrat de travail

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité d’agent de surface.

Le 5 février 2010, son employeur lui notifie un avertissement que le salarié conteste.

Le 8 février 2010, sa mutation lui est notifiée sur un autre site de l’entreprise.

Finalement, le salarié est licencié pour faute grave le 22 avril 2010. 

Il décide de saisir la juridiction prud'homale, estimant que sa mutation avait été motivée par son refus de se soumettre à la fois à une réduction de son temps de travail et par voie de conséquence de sa rémunération, que son employeur voulait lui imposer. 

La Cour de cassation, tout comme l’avait fait auparavant la cour d’appel, donne raison au salarié.

Les juges estiment en effet, que la mutation du salarié, qui l'éloignait du lieu où il travaillait depuis près de 6 ans, était motivée par son refus de se soumettre à une réduction de son temps de travail et de sa rémunération que voulait lui imposer le nouvel employeur. 

De ce fait, l’employeur avait mis en œuvre la clause de mobilité de manière déloyale pour sanctionner un salarié, lequel s’opposait, à juste titre, à une modification de son contrat de travail. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'ayant fait ressortir que la mutation du salarié, qui l'éloignait du lieu où il travaillait depuis près de six ans, était motivée par son refus de se soumettre à une réduction de son temps de travail et par conséquent de sa rémunération que voulait lui imposer le nouvel employeur, ce dont il résultait que celui-ci avait mis en oeuvre la clause de mobilité de manière déloyale pour sanctionner un salarié qui s'opposait à juste titre à une modification de son contrat de travail, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°12-28661

Commentaire de LégiSocial

Cette affaire est pour nous l’occasion de rappeler quelques principes majeurs de la clause de mobilité comme suit.

Principe et objectif

Cette clause permet à l’employeur de se réserver la possibilité de modifier le lieu de travail du salarié et cela sans son accord.

  • La mutation du salarié = modification des modalités d’exécution du contrat de travail ;
  • Le refus du salarié= sanction disciplinaire qui peut aller jusqu’au licenciement pour faute grave.

Conditions de validité ?

On peut dénombrer 7 conditions de validité  à respecter :

Sur le contrat de travail : 

Elle doit être expressément indiquée sur le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires).

La zone géographique précise : 

La clause doit préciser la zone géographique de mobilité en sachant qu’aucune disposition légale ne limite la distance ou l’éloignement qui peut être imposé au salarié.

Le salarié peut donc voir sa clause de mobilité porter sur un département, une région, toute la France, et pourquoi pas sur plusieurs pays.

Le respect de la convention collective :

Avant d’insérer une telle clause dans un contrat de travail, l’employeur doit veiller au respect des procédures prévues par la convention collective dont il dépend.

Changement unilatéral impossible :

L’employeur ne peut sans l’accord du salarié modifier la zone géographique concernée par la clause.

Cette modification unilatérale serait alors interprétée comme la modification du contrat de travail sans l’accord du salarié, qui pourrait conduire par exemple à une prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié. 

Rupture automatique du contrat :

L’employeur ne peut en aucun cas prévoir la rupture automatique du contrat en cas de refus du salarié de se soumettre à cette clause de son contrat de travail.

Cour de cassation 19/05/2004 n° 02-43252 D

Clause conforme aux intérêts légitimes de l’entreprise : 

Elle doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et être proportionnée au but recherché et aux activités du salarié.

Dans le cas contraire, le salarié serait en droit de refuser la mutation.

Son refus ne pourrait en aucun cas être considéré comme un motif permettant un licenciement.

Un délai de prévenance doit être respecté. 

Si la convention collective en prévoit un bien entendu, sachant qu’il n’existe pas de délai minimum légal. 

La clause de mobilité ne doit pas être confondue avec la clause prévoyant des déplacements professionnels.

Ainsi, la clause prévoyant la réalisation du travail dans un lieu différent du lieu d’affectation en fonction des nécessités de l’entreprise ne doit pas être assimilée à une clause de mobilité.

Cour de cassation du 27/05/1998 n° 96-40.929P