Discrimination syndicale et préjudice automatique

Jurisprudence
RH Discrimination

La victime d’une discrimination syndicale établie subit nécessairement un préjudice qui doit automatiquement être indemnisé.

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Contexte de l'affaire

Un salarié, investi d’un mandat de délégué du personnel, est déclaré inapte à son poste de travail.


Saisi par l'employeur d'une demande d'autorisation de licenciement du salarié pour inaptitude, l'inspecteur du travail  rend une décision de refus d'autorisation..

Après l'expiration de la période de protection attachée à son mandat, le salarié est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié saisit alors la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement et sollicite des dommages-intérêts pour licenciement nul et pour discrimination syndicale.

La Cour d’appel constate que la discrimination alléguée par le salarié est caractérisée. Pourtant, elle déboute le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, aux motifs que le salarié n'apporte aucun élément permettant de justifier de la réalité d'un préjudice et que "la satisfaction d’avoir été jugé victime de discrimination suffit à réparer le préjudice allégué''.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel en s’appuyant sur les articles d’ordre public L. 2141-5 à L.2141-7 du Code du travail qui interdisent à un employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions.

 Toute mesure prise par l'employeur contrairement à ces dispositions est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts.

Il en résulte que le seul constat de l'existence d'une discrimination syndicale ouvre droit à réparation.

Cour de cassation du , pourvoi n°23-21 .124

Les questions soulevées par l’arrêt

  1. Quelles sont les conséquences de la discrimination syndicale ?
  1. Qui a la charge de prouver une discrimination syndicale ?

Les points clés de la décision de la Cour de cassation

  • La discrimination syndicale est un manquement de l’employeur donnant lieu à réparation

Les articles L. 2141-5 à L. 2141-7 du Code du travail interdisent à un employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions.

Toute mesure prise par l’employeur contrairement à ces disposions est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts .

  • Création d’un nouveau cas de « préjudice automatique »

En principe, la victime doit prouver le préjudice qu’elle a subi pour obtenir réparation.

Or, dans cet arrêt, la Cour de cassation pose une exception à ce principe : la victime d’une discrimination syndicale subit nécessairement un préjudice qui ouvre automatiquement à réparation et qui doit être indemnisé.

Elle crée donc une nouvelle illustration de la théorie du « préjudice nécessaire » ou « automatique » qui veut que la victime n’a pas à justifier de l’étendue de son préjudice pour en obtenir réparation.

Le dommage se déduit de la faute de l’employeur sans que le salarié ait besoin de présenter des éléments probants pour démontrer qu’il a subi un préjudice découlant directement de cette faute.

Cette exception vient s’ajouter à la liste des manquements de l’employeur qui causent nécessairement un préjudice au salarié, que la Cour avait déjà identifiés :

  • Le non-respect du temps de repos quotidien
  • Le non-respect du temps de pause quotidien
  • Le dépassement de la durée quotidienne et hebdomadaire maximale de travail
  • La violation de l’interdiction d’emploi pendant un arrêt maladie ou d’un congé maternité
  • Le non-respect du droit à l’image du salarié

Impact pour l’employeur

La discrimination syndicale crée une présomption de préjudice impossible à contester par l’employeur : en pratique, dès lors que son manquement est reconnu, il est condamné.

La liste des cas de « préjudice automatique » s’allonge et invite l’employeur à la plus grande vigilance.

Références légales et jurisprudentielles

  • Articles L. 2141-5 à L. 2141-7 du Code du travail
  • Création d’un nouveau cas de préjudice nécessaire qui rallonge la liste des cas déjà existants, dont notamment :
  • soc. 4 septembre 2024 n°23-15.944 ; n°22-16.129).
  • soc. 13 avril 2016 n°14-28.293).