Cet article a été publié il y a 6 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Le 5 juin 2018, Muriel Pénicaud, ministre du travail, et Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées, ont présenté un premier point d’étape sur la politique de l’emploi des personnes en situation de handicap. Nous avons identifié 8 mesures clés, dans le dossier de presse diffusé par le Ministère du travail, que la publication vous présente en détails.
Quelques chiffres
En préambule, avant d’aborder les 5 mesures clés annoncées, le dossier de presse du 5 juin 2018, proposé sur le site du Ministère du travail confirme les chiffres suivants :
- 2,7 millions de personnes sont actuellement en situation de handicap et en âge de travailler ;
- Alors que le taux de chômage « tout public » est de 10%, il est de 19% pour les travailleurs handicapés ;
- Alors que l’ancienneté moyenne d’inscription au chômage « tout public » est de 595 jours, il passe à 801 jours pour les travailleurs justifiant d’une reconnaissance handicapée ;
- ¾ des demandeurs d’emploi handicapés justifient d’un niveau de qualification inférieure au BAC.
Mesure 1 : simplifier la démarche des entreprises
La situation actuelle
Le Gouvernement constate qu’actuellement, la déclaration d’emploi de travailleurs handicapés, c’est :
- 5 formulaires différents ;
- Une centaine de rubriques à renseigner ;
- Et un calcul « manuel » de l’obligation d’emploi et de l’éventuelle contribution due.
La mesure annoncée
À compter du 1er janvier 2020, Muriel Pénicaud et Sophie Cluzel annoncent une « simplification des démarches ».
C’est ainsi :
- Que le calcul de l’obligation d’emploi sera automatisé, par un traitement via la DSN ;
- 1 seul interlocuteur sera proposé pour le recouvrement de l’éventuelle contribution : l’URSSAF ou la MSA (ces organismes seront alors en charge de reverser les sommes perçues auprès de l’AGEFIPH).
Une précision importante à ce sujet :
Toutes les entreprises seront concernées, y compris les TPE actuellement non soumises à l’obligation d’emploi.
L’objectif du Gouvernement est « de rendre visible l’effort des TPE et de renforcer la mobilisation collective leurs efforts en matière de recrutement de travailleurs handicapés » (NDLR : peut-être dans l’optique plus tard de déclencher des mesures incitatives, une sorte de « bonus » handicap ?).
Mesure 2 : faciliter l’accès à l’apprentissage
La situation actuelle
Le constat actuel est le suivant :
- Seuls 1,2% des apprentis sont des travailleurs handicapés alors que cette voie constitue un outil privilégié d’insertion professionnelle.
Les mesures annoncées
- La généralisation de « référents handicap » dans tous les CFA ;
- Chaque CFA percevra systématiquement une aide supplémentaire pour chaque apprenti en situation de handicap ;
- Adaptation des enseignements et des postes de travail.
Mesure 3 : le quota de 6% mis en débat tous les 5 ans
La situation actuelle
Selon les articles L 5212-1 et L 5212-2 du code du travail, les employeurs comptant un effectif d’au moins 20 salariés doivent employeur des travailleurs handicapés à hauteur de 6% de leur effectif
Article L5212-1
Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 43
Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout employeur, occupant au moins vingt salariés, y compris les établissements publics industriels et commerciaux.
Article L5212-2
Tout employeur emploie, dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés, mentionnés à l'article L. 5212-13.
Les mesures annoncées
Ainsi que nous vous l’indiquions dans une précédente actualité consacrée au projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », cette obligation d’emploi resterait fixée à 6 %, mais ferait l’objet d’une « révision » tous les 5 ans.
Lire aussi : Le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » en bref Actualité
Présenté en Conseil des ministres du vendredi 27 avril 2018 par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » contient de nombreuses mesures, que nous ...
Tout en rappelant que le taux de 6% constitue un taux minimal (impossible donc de le diminuer dans l’avenir), la ministre du travail confirme qu’un « grand débat parlementaire permettra d’apprécier l’impact de la politique en faveur de l’emploi des personnes handicapées, notamment celui du taux de l’obligation d’emploi », en d’autres termes, le taux ne sera pas révisé automatiquement tous les 5 ans, mais pourra faire l’objet d’une révision suite au débat parlementaire.
Mesure 4 : une obligation d’emploi estimée au niveau de l’entreprise
La situation actuelle
Actuellement, l’obligation d’emploi de 6% s’évalue au niveau de l’établissement et non de l’entreprise.
Article L5212-3
Dans les entreprises à établissements multiples, l'obligation d'emploi s'applique établissement par établissement.
Les entreprises de travail temporaire ne sont assujetties à l'obligation d'emploi que pour leurs salariés permanents.
L’effectif de l’entreprise n’étant pris en considération que pour le calcul de la contribution, si l’établissement ne remplissait son obligation d’emploi et serait alors contraint de verser la contribution AGEFIPH.
Article D5212-26
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
Les montants mentionnés au 3° de l'article D. 5212-19 afin de tenir compte de l'effectif de l'entreprise sont fixés :
1° A 400 fois le salaire horaire minimum de croissance dans les entreprises de 20 à 199 salariés ;
2° A 500 fois le salaire horaire minimum de croissance dans les entreprises de 200 à 749 salariés ;
3° A 600 fois le salaire horaire minimum de croissance dans les entreprises de 750 salariés et plus.
Les mesures annoncées
C’est une modification importante qui est annoncée, car l’obligation d’emploi (donc le seuil de 20 salariés) serait apprécié au niveau de l’entreprise (et plus au niveau du seul établissement).
Le dossier de presse indique à ce sujet que « cela devra permettre d’augmenter le périmètre des entités concernées et le potentiel d’emploi de travailleurs handicapés de plus de 100 000 salariés ; Le gouvernement souhaite évaluer dans les prochains mois avec les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel et dans les branches professionnelles les impacts d’une telle évolution et d’en déterminer avec eux le calendrier et les conditions de déploiement.»
Mesure 5 : atteindre l’obligation d’emploi de 6%
La situation actuelle
Le dossier de presse fait le constat suivant :
- 30 ans après la loi de 1987 qui a instauré une obligation d’emploi de 6% de travailleurs handicapés, seuls 3,4% des emplois du secteur privé sont occupés par des travailleurs handicapés ;
- Ces personnes représentent 5,2% des agents publics ;
- Et 1/3 des entreprises comptent moins de 2% de travailleurs handicapés dans leurs effectifs.
Il en ressort que l’obligation d’emploi de 6% n’est actuellement pas atteinte généralement.
Les mesures annoncées
Ainsi que le dossier de presse nous le confirme, afin d’inciter « les employeurs à intégrer des personnes handicapées dans leur collectif de travail, tous les types d’emplois seront pris en compte pour l’atteinte des 6% quel que soit leur statut : stagiaire, périodes de mise en situation professionnelle, intérimaire, titulaire de contrats aidés, alternants ».
C’est une modification importante à nos yeux qui est apportée, en effet actuellement :
- L’accueil des stagiaires ne permet de remplir l’obligation qu’à hauteur de 2% de l’effectif de l’établissement ;
- La conclusion de contrats avec des travailleurs handicapés indépendants ne permet de remplir que 50% de l’obligation d’emploi ;
- L’accueil de personnes handicapées dans le cadre des PMSMP (Périodes de Mise en Situation en Milieu Professionnel) est limité à 2% de l’effectif total de l’établissement.
À la lecture du dossier de presse, la prise en compte de ces catégories semblerait être retenue sans limite.
Mesure 6 : accords collectifs agréés
La situation actuelle
En application des articles L 5212-8 et R 5212-14, l’application d’un accord collectif dit « agréé » équivaut à un respect de l’obligation de l’emploi et permet l’exonération de la contribution AGEFIPH.
Article L5212-8
L'employeur peut s'acquitter de l'obligation d'emploi en faisant application d'un accord de branche, de groupe, d'entreprise ou d'établissement agréé prévoyant la mise en œuvre d'un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés.
Article R5212-14
Modifié par DÉCRET n°2014-1386 du 20 novembre 2014 - art. 1
Le programme annuel ou pluriannuel prévu par les accords de l'article L. 5212-8 comporte un plan d'embauche en milieu ordinaire, un plan de maintien dans l'entreprise ainsi qu'une au moins des actions suivantes :
1° Un plan d'insertion et de formation ;
2° Un plan d'adaptation aux mutations technologiques.NOTA :
Ces dispositions sont applicables aux accords mentionnés à l'article L. 5212-8 du code du travail signés à compter du 1er janvier 2015.
Mais ainsi que l’indique le dossier de presse, l’impact « positif semble s’émousser dans le temps » :
- Les 2/3 de ces accords se contentent de renouveler des actions financées par l’entreprise sans embauche supplémentaire ;
- Seulement 16% des établissements de plus de 500 salariés sous accord dépassent le seuil légal de 6%, contre 19% sans accord.
Les mesures annoncées
Ces accords « agréés » seraient limités dans le temps, selon une durée de 3 ans, ne pouvant être renouvelé qu’une fois (soit une durée maximale de 6 ans).
Mesure 7 : révision des ECAP
La situation actuelle
Actuellement, les établissements peuvent bénéficier d’une minoration de l’obligation d’emploi par la prise en compte des ECAP (Emplois exigeant des Conditions d’Aptitude Particulière).
Le principe est de vérifier si certains postes dans l’entreprise ne se retrouveraient pas au sein de l’article D 5212-25, empêchant alors de les proposer aux personnes reconnues handicapées, et diminuant arithmétiquement l’obligation d’emploi (par l’application d’un coefficient de minoration).
Article L5212-9
Modifié par LOI n°2010-1657 du 29 décembre 2010 - art. 208 (V)
L'employeur peut s'acquitter de l'obligation d'emploi en versant au fonds de développement pour l'insertion professionnelle des handicapés prévu à l'article L. 5214-1 une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires de l'obligation qu'il aurait dû employer.
Le montant de cette contribution peut être modulé en fonction de l'effectif de l'entreprise et des emplois, déterminés par décret, exigeant des conditions d'aptitude particulières, occupés par des salariés de l'entreprise. Il tient également compte de l'effort consenti par l'entreprise en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct des bénéficiaires mentionnés à l'article L. 5212-13, notamment ceux pour lesquels l'association mentionnée à l'article L. 5214-1, a reconnu la lourdeur du handicap, ou de ceux rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi.
Les mesures annoncées
Cette liste des ECAP serait revue (et selon nos sources, pourrait disparaitre à terme).
Mesure 8 : minoration au titre des efforts consentis
La situation actuelle
Actuellement, en application de l’article L 5212-9 du code du travail, les employeurs peuvent bénéficier d’une minoration de l’obligation d’emploi en fonction des « efforts consentis ».
La détermination de cette minoration de l’obligation d’emploi est fixée par l’article D 5212-13 du code du travail.
Article D5212-23
Modifié par Décret n°2009-1377 du 10 novembre 2009 - art. 11 (V)
Le coefficient de minoration, au titre des efforts consentis par l'employeur en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct de bénéficiaires de l'obligation d'emploi, est égal :
1° A 0, 5 à titre permanent pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi et âgé de moins de vingt-six ans ou de cinquante ans révolus et plus ;
2° A 1 pour l'embauche ou le maintien dans l'emploi d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi pour lequel le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a reconnu la lourdeur du handicap, en application de l'article R. 5213-45, pour la durée de la validité de la décision ;
3° A 0, 5 la première année pour l'embauche du premier travailleur handicapé appartenant à l'une des catégories de bénéficiaires de l'obligation d'emploi ;
4° A 1 la première année pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi en chômage de longue durée ;
5° A 1 à titre permanent pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi à sa sortie d'une entreprise adaptée, d'un centre de distribution de travail à domicile ou d'un établissement ou service d'aide par le travail.NOTA :
Décret n° 2009-1377 du 10 novembre 2009 article 7 I : Les dispositions du présent décret prennent effet, dans chaque région, à la date de nomination du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Les arrêtés de nomination de ces directeurs ont été publiés par arrêtés des 30 décembre 2009 et 9 février 2010, parus respectivement au Journal officiel des 5 janvier et 14 février 2010).
Conformément à l'article 15 du même décret elles ne s'appliquent ni à la région Ile-de-France ni aux régions d'outre-mer.
Conformément à l'article 2 du décret n° 2010-687 du 24 juin 2010, les dispositions du décret n° 2009-1377 du 10 novembre 2009 s'appliquent à la région Ile-de-France à compter du 1er juillet 2010.
Les mesures annoncées
Toutes ces minorations seraient supprimées (à l’exception de celle prévue pour les salariés de 50 ans et plus).
Info supplémentaire
La ministre du travail demandera au parlement une autorisation de légiférer par voie d’ordonnances pour intégrer les résultats de la concertation dans la réglementation.