Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée en 1980 en qualité de gestionnaire.
La société qui l’a engagée est mise en liquidation puis cédée à une nouvelle société.
A la suite d'un rapport d'audit comptable du 31/08/2007, la salariée est licenciée par le nouvel employeur pour faute grave le 8/10/2007.
La salariée saisit la juridiction prud’homale, estimant que le délai de 2 mois pour sanctionner les faits qui lui sont reprochés, sont prescrits.
Dans un premier temps, la cour d’appel déboute la salariée de sa demande.
Les juges considèrent en effet qu’un délai de moins de 2 mois s’est écoulé entre le dépôt du rapport d'audit et le licenciement de la salariée par l'employeur ayant repris son contrat.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour dire que les faits reprochés à la salariée n'étaient pas prescrits, la cour d'appel retient que ceux-ci ne pouvaient être sanctionnés par l'ancien employeur, lui-même impliqué, et qu'un délai de moins de deux mois s'est écoulé entre le dépôt du rapport d'audit et le licenciement de la salariée par l'employeur ayant repris son contrat ;
Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis, et casse et annule l’arrêt de la cour d’appel.
Les juges indiquent ainsi que le nouvel employeur ne pouvait invoquer à l'appui du licenciement du salarié des manquements commis par celui-ci alors qu'il se trouvait sous l'autorité de l'ancien employeur, que si le délai de 2 mois depuis la connaissance des faits par le cédant n'est pas écoulé.
Extrait de l’arrêt :
Attendu cependant que le nouvel employeur ne peut invoquer à l'appui du licenciement du salarié des manquements commis par celui-ci alors qu'il se trouvait sous l'autorité de l'ancien employeur, que si le délai de deux mois depuis la connaissance des faits par le cédant n'est pas écoulé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi principal :CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Commentaire de LégiSocial
C’est une affaire assez particulière que nous abordons ici.
Elle pose la question de savoir si des faits fautifs peuvent donner lieu à sanction, et repose sur le « réputé » délai de 2 mois que nous vous proposons de préciser.
Délai pour sanctionner des faits fautifs :
Le code du travail donne une règle très précise concernant le délai pendant lequel l’employeur pourra prononcer une sanction vis-à-vis de son salarié.
Ainsi, un délai de 2 mois est possible, à partir du moment où l’employeur a connaissance des faits pour prononcer une sanction (blâme, avertissement ou licenciement éventuellement).
Article L1332-4
Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Prescription des sanctions :
De la même façon, un employeur ne peut prononcer une nouvelle sanction en rappelant des sanctions antérieures au-delà d’un délai de 3 ans.
Article L1332-5
Aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction.