L’indemnité de précarité est à exclure pour comparer le salaire d’un CDD et d’un CDI

Jurisprudence
Contrat de travail

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Un salarié est engagé, en qualité de câbleur, le 29/03/1999. 

En 2005, classé au niveau II, coefficient 240 de la convention collective de la métallurgie, il percevait dans l’année :

  • Un salaire brut de 1.530 € outre prime d'ancienneté de 58,84 € ;
  • Et un 13e mois versé par 12ème à chaque fin de mois de 127,50 € ;
  • Soit au total 1.716,34 € ou 1.657,50 € hors prime d'ancienneté.

Licencié pour cause réelle et sérieuse le 6 avril 2005, il saisit la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir notamment une indemnité pour non-respect du principe " à travail égal, salaire égal ", en faisant état de la rémunération supérieure à la sienne perçue par un autre salarié, recruté sous contrat à durée déterminée avec une classification inférieure. 

La cour d’appel puis la Cour de cassation déboutent le salarié de sa demande. 

En effet, afin de s’assurer du respect du principe de l’égalité de traitement entre salariés, l’indemnité de précarité, qui compense la situation « précaire » du salarié en CDD, ne doit pas être prise en compte dans la comparaison entre les deux rémunérations.

Extrait de l’arrêt 

Attendu, ensuite, qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve, la cour d'appel, après avoir écarté à bon droit du champ de la comparaison à effectuer pour s'assurer du respect du principe de l'égalité de traitement entre salariés l'indemnité de précarité, qui compense pour le salarié la situation dans laquelle il est placé du fait de son contrat à durée déterminée, a constaté que M. X... avait en réalité perçu une rémunération supérieure à celle du salarié en cause ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°10-18672

Les contrats CDD sont des contrats d’exception pour lesquels le caractère précaire est reconnu.  

C’est la raison pour laquelle, les employeurs doivent verser une indemnité  de précarité (appelée aussi parfois « prime de précarité »)  au terme du contrat.

La définition légale

Le Code du travail indique qu’au terme d’un contrat CDD, si les relations ne se poursuivent pas, l’employeur doit verser une indemnité de fin de contrat.

Cette indemnité de fin de contrat est destinée à compenser la précarité de la situation et son taux est fixé à 6%.

Article L1243-8

Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.

Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.

Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant.

Un taux éventuellement réduit à 6%

Une convention collective, un accord de branche étendu, un accord d'entreprise ou un accord d'établissement peut prévoir de limiter l'indemnité de précarité des CDD à hauteur de 6 % pour améliorer la formation professionnelle des salariés concernés.  

Des contreparties doivent alors être offertes au salarié sous la forme, notamment, d'un accès privilégié à la formation professionnelle. 

Dans ce cas, l'accord collectif peut prévoir une action de développement des compétences en dehors du temps de travail ainsi qu'un bilan de compétences qui sont alors assimilés à des actions de formation ou des bilans de compétences réalisés dans le cadre du plan de formation. 

Cependant, pour se prévaloir du taux réduit, l'employeur doit avoir effectivement proposé un accès à la formation.

S'il ne le fait pas, il est redevable de l'indemnité au taux normal de 10 %.

Cour de cassation du 11/07/2007, arrêt 06-41765

Cour de cassation du 23/01/2008, arrêt 06-44190

Cour de cassation du 3/07/2012 arrêt 11-16269

Vous pouvez retrouver l’arrêt du 3/07/2012 en détails, en cliquant ici :

Le calcul

L’indemnité est calculée sur l’ensemble des salaires bruts versés au salarié.

Exemple chiffré :

  • Un salarié perçoit 1.500 € de salaire brut du 1er mars 2012 au 30 avril 2012 ;
  • Le cumul des salaires est donc de 1.500€+ 1.500 € = 3 000€ ;
  • L’indemnité de précarité sera alors de 3.000€ * 10% = 300 € .

L’indemnité de précarité se calcule toujours avant l’indemnité compensatrice de congés payés. 

Pour s’en souvenir, un moyen mnémotechnique : précarité comme « premier » !

Quelques particularités :

  • L’indemnité de précarité ne doit jamais prendre dans le cumul des salaires les éventuelles indemnités compensatrices de congés payés réglés en cours de contrat;
  • L’indemnité de précarité ne doit pas être calculée sur les indemnités de déplacement;
  • Elle ne doit pas être calculée sur les IJSS (Indemnités Journalières de Sécurité Sociale) versées pendant un arrêt de maladie comme l’indique une circulaire de la DGT du 29/08/1992;
  • En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle survenus pendant le contrat de travail CDD, le calcul de la prime de précarité doit se faire sur la valeur des salaires qui auraient dû être versés ;

(Cour de Cassation du 09/10/1990)

  • En cas de rupture anticipée injustifiée de la part de l’employeur, l’indemnité de  précarité est calculée sur la totalité des salaires qui devaient être versés .

Les 10 cas où l’indemnité n’est pas due

Il existe certains cas pour lesquels l’indemnité de précarité n’est pas due. 

Les cas concernés sont les suivants :

  1. Pour un contrat CDD saisonnier ou pour un CDD réalisé dans un secteur où il est d’usage de recourir aux contrats CDD ;
  2. Pour un CDD réalisé dans le cadre de la politique de sauvegarde de l’emploi (contrat aidé) ;
  3. Lors de la rupture d’un contrat CDD par l’employeur pour une faute grave ou lourde du salarié ;
  4. En cas de rupture anticipée du contrat CDD à la demande du salarié ;
  5. Si à la fin du contrat CDD le salarié refuse un CDI (sauf si le CDI proposé est moins favorable pour le salarié, par exemple un salaire moins important) ;
  6. En cas de refus du salarié de prolonger le CDD (la mention indiquant un renouvellement automatique doit obligatoirement être présente sur contrat de travail) ;
  7. Si le contrat CDD se transforme en CDI, car le caractère précaire du contrat n’est plus existant ;
  8. Si la rupture se produit pendant la période d’essai ;
  9. Si le CDD est réalisé avec un jeune pendant ses vacances scolaires (quel que soit le motif du CDD), selon la circulaire de la DRT du 29/08/1992.
  10. Lorsque le CDD est conclu dans le cadre d’un CDDI (CDD d’Insertion) modifié par la loi LRSA, contrat CDD qui est assimilé à un contrat CDD dans le cadre de la politique de l’emploi.

Article L1243-10

L'indemnité de fin de contrat n'est pas due :

1° Lorsque le contrat est conclu au titre du 3° de l'article L. 1242-2 ou de l'article L. 1242-3, sauf dispositions conventionnelles plus favorables ;

2° Lorsque le contrat est conclu avec un jeune pour une période comprise dans ses vacances scolaires ou universitaires ;

3° Lorsque le salarié refuse d'accepter la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente ;

4° En cas de rupture anticipée du contrat due à l'initiative du salarié, à sa faute grave ou à un cas de force majeure

Article L1242-2

Modifié par Ordonnance n°2010-462 du 6 mai 2010 - art. 1

Sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants (…)

3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

Article L1242-3

Outre les cas prévus à l'article L. 1242-2, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu :

1° Au titre de dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi ;

2° Lorsque l'employeur s'engage, pour une durée et dans des conditions déterminées par décret, à assurer un complément de formation professionnelle au salarié.

Confirmation d’une circulaire ministérielle du 30/10/1990

Pour en revenir à l’affaire présente, on notera que le présent arrêt de la Cour de cassation confirme la position du Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle dans sa circulaire du 30/10/1990.

Cette circulaire avait pour objet la circulaire DRT n° 18/90 relative au contrat de travail à durée déterminée et au travail temporaire. 

La position du Ministère indiquait en l’occurrence que :

Lorsqu'elle est due, cette indemnité qui a la nature juridique d’un salaire, s’ajoute à la rémunération totale brute due au salarié (primes et accessoires divers compris).

Elle ne saurait donc être prise en compte pour comparer le montant de la rémunération due à un salarié embauché par contrat de travail à durée déterminée avec celle d'un salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée dans le cadre de l'application du principe d'égalité de rémunération posé par l’article L 122-3-3 (2è alinéa) du code du travail.

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