Salarié itinérant : attention au périmètre géographique !

Jurisprudence
Paie Clause de mobilité

La Cour de cassation a rendu un arrêt significatif le 11 juin 2025, réaffirmant les principes relatifs à la mobilité géographique des salariés itinérants.

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Contexte de l'affaire

Un salarié, monteur de gaines de ventilation, était qualifié d'itinérant mais intervenait exclusivement sur des chantiers en Île-de-France.

À la suite de la fermeture d’un site logistique auquel il était rattaché, son employeur a décidé de l’affecter durablement sur des chantiers situés dans le Grand Est, avec une prise de poste désormais prévue en Meurthe-et-Moselle.

Refusant ce changement de son secteur géographique d'activité, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Extrait de Cass. soc. du 11 juin 2025, n° 24-14.412

"Réponse de la Cour

7. La cour d'appel ayant constaté que l'intéressé, salarié itinérant dont le contrat ne comportait aucune clause de mobilité, avait été affecté exclusivement depuis son embauche sur des chantiers situés dans la région parisienne, le retrait du matériel s'effectuant à Châtres (77), et que la société l'avait informé le 24 février 2020 de prendre son service à Colombey-les-Belles (54) à compter du 16 mars 2020, avec des chantiers à assurer dans la région Grand-Est, a ainsi caractérisé, en l'absence d'affectation temporaire, une modification unilatérale du secteur géographique d'activité du salarié par l'employeur et a exactement retenu que cette décision constituait non un simple changement des conditions de travail mais une modification du contrat de travail.

8. Elle a pu en déduire l'existence d'un manquement de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail et prononcer la résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

9. Le moyen n'est donc pas fondé."

Cour de cassation du , pourvoi n°24-14.412

Décision de la cour

La Cour de cassation valide l’analyse de la cour d’appel : en l’absence de clause de mobilité dans le contrat de travail, l’affectation durable du salarié sur un nouveau secteur géographique d'activité, distinct du précédent, constitue une modification du contrat et non un simple aménagement de ses conditions de travail.

Or, seule une affectation temporaire et justifiée par des circonstances exceptionnelles ou par la nature des fonctions peut être imposée à un salarié en dehors de son secteur habituel.

En l’espèce, le changement proposé était pérenne et entraînait un déplacement d'une région à une autre non voisine.

Le refus du salarié était donc légitime et la modification unilatérale opérée par l’employeur constituait un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat à ses torts.

Impact en paie

Cette décision rappelle plusieurs points de vigilance concernant les salariés itinérants :

  • Clause de mobilité absente : Si le contrat ne prévoit pas expressément une mobilité géographique, tout changement de secteur durable implique l’accord du salarié. Il ne peut s’agir que d’un avenant contractuel, avec toutes les incidences en matière de rémunération (ex. : indemnités de déplacement, frais supplémentaires, éventuels avantages liés au nouveau secteur).
  • Déplacement temporaire autorisé : Un employeur peut imposer un changement temporaire de secteur uniquement si ce déplacement est exceptionnel et clairement circonscrit dans le temps ou si les fonctions exercées supposent une mobilité naturelle. Dans ce cas, aucune modification contractuelle n’est nécessaire, mais il reste impératif d’informer le salarié en amont et de respecter un délai raisonnable.
  • Substitutions de lieu de prise de poste : Le lieu d’approvisionnement ou de démarrage de la journée de travail, s’il est modifié de manière durable et situé hors du périmètre habituel, peut avoir des effets sur les temps de trajet, les remboursements de frais ou les horaires. Cela nécessite une mise à jour de certains paramètres de paie (prise en charge des frais professionnels, paniers, majorations pour dépassement d’horaires, etc.).