Prescription de l’action de l’URSSAF : la Cour de cassation rappelle les limites du recouvrement forcé

Jurisprudence
Paie URSSAF

La Cour de cassation a rappelé que les URSSAF ne peuvent pas agir au-delà du délai de prescription pour recouvrer une dette via une mesure d’exécution forcée.

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Contexte de l'affaire

Dans cette affaire (Cass. 2e civ., 26 juin 2025, n° 23-14.662), l’URSSAF d’Aquitaine avait signifié une contrainte à une cotisante, Mme X, le 13 juin 2018, en vue du recouvrement de cotisations sociales. Aucun acte d’exécution n’avait été engagé dans les trois années suivantes. Ce n’est que le 8 octobre 2021 que l’organisme procède à une saisie-attribution sur le compte bancaire de Mme X, précédée d’un commandement de payer du 4 octobre 2021.

Estimant que cette mesure est prescrite, la débitrice saisit le juge de l'exécution, qui lui donne raison. La cour d’appel de Bordeaux annule la saisie au motif que le délai de prescription était expiré au moment de l’acte. L’URSSAF forme un pourvoi en cassation.

Extrait de la Cass. 2e civ. du 26 juin 2025 n° 23-14.662

"Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article 25, VII, de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021, alinéa 1, tout acte de recouvrement qui aurait dû être émis par les organismes de recouvrement des régimes obligatoires de sécurité sociale ou leurs délégataires à une date comprise entre le 2 juin 2021 et le 30 juin 2022 peut être valablement émis dans un délai d'un an à compter de cette date.

5. Selon l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée au redevable.

6. Selon l'article L. 244-8-1 du code de la sécurité sociale, le délai de prescription de l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard, est de trois ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3.

7. Selon l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, le délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte, décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard, non contestée et devenue définitive, est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d'exécution signifié en application de cette contrainte.

8. Il résulte de l'application combinée de ces textes que le report de délai prévu par le premier de ceux-ci ne s'applique pas au délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte prévu par le dernier."

Cour de cassation du , pourvoi n°23-14.662

Décision de la Cour

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel et rejette le pourvoi de l’URSSAF.

Elle rappelle qu’en vertu de l’article L. 244-9 du Code de la sécurité sociale, l’action en exécution d’une contrainte se prescrit par trois ans à compter de la date de notification de celle-ci ou du dernier acte interruptif de prescription. En l’espèce, la contrainte ayant été notifiée le 13 juin 2018, l’action était prescrite au plus tard le 2 octobre 2021 (délai reporté en raison de la suspension temporaire des délais due à la crise sanitaire).

L’URSSAF soutenait que l’article 25-VII de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021, qui prolongeait certains délais d’action dans le cadre de la crise sanitaire, s’appliquait également à l’exécution des contraintes. La Cour écarte cet argument : cette disposition concerne uniquement les délais pour initier des actes de recouvrement mais ne proroge pas les délais de prescription des actions en exécution forcée.

Impact en paie

Cette décision a des conséquences concrètes pour les entreprises :

  • Renforcement de la sécurité juridique : une entreprise ou un cotisant ne peut faire l’objet d’un recouvrement forcé (type saisie-attribution) par l’URSSAF si aucun acte interruptif n’a été accompli dans un délai de trois ans à compter de la notification de la contrainte. Au-delà de ce délai, la prescription est acquise.
  • Surveillance des échéances : La chronologie des notifications et des actes exécutoires est importantes. En cas de contestation d’une saisie, il est essentiel de vérifier la date de la contrainte et les actes accomplis ensuite.
  • Cadre légal précisé : la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021, bien qu’ayant instauré une prolongation d’un an pour certains actes de recouvrement, ne permet pas aux URSSAF de contourner les règles de prescription applicables aux voies d’exécution forcée. Seuls les actes initiaux sont concernés.
  • Contentieux du recouvrement : les entreprises ou cotisants ayant reçu des mesures d’exécution tardives peuvent contester une saisie.