Requalification de CDD non successifs en CDI : sort des périodes interstitielles

Jurisprudence
RH CDD

La Cour de cassation maintient sa position sur le sujet.

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Cet article a été publié il y a 5 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

L’affaire que nous commentons aujourd’hui concerne un salarié engagé par une société de télévisions, en qualité de chef opérateur prise de vue, à compter du 29 avril 1991 et jusqu'au 10 janvier 2016, dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée d'usage.

Le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet, en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de sommes liées à cette requalification ainsi qu'à la rupture pour le premier, et en paiement de dommages-intérêts pour le second. 

Dans son arrêt du 10 novembre 2016, la Cour d'appel de Paris donne raison au salarié, requalifiant les contrats CDD non successifs en CDI.

Elle estime d’autre part, que la demande du salarié ouvre droit au paiement d’un rappel de salaires au titre des périodes interstitielles séparant chaque contrat.

Elle met en avant le fait que le salarié devait être considéré comme ayant été, de façon permanente à la disposition de son employeur durant les périodes séparant chacun des contrats CDD. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour fixer le salaire de base à la somme de 2 522 euros correspondant à un temps complet et condamner l'employeur à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel de salaires et congés payés afférents, indemnité de requalification, prime d'ancienneté et congés payés afférents, prime de fin d'année (…), l'arrêt retient que les contrats à durée déterminée ne satisfaisaient pas aux conditions de l'article L. 3123-14, qu'ainsi, il y a lieu de vérifier si l'employeur mettait le salarié en mesure de prévoir ses conditions de travail, sans que celui-ci ait besoin de se tenir en permanence à sa disposition, mais que le salarié expose et justifie qu'il n'était jamais prévenu utilement à l'avance par l'employeur, de ses jours comme de ses horaires de travail, qu'aucun planning ne lui était, de même, communiqué à l'avance de sorte qu'il lui était impossible de connaître son rythme de travail et ses périodes de repos, les périodes de travail étant susceptibles d'être prolongées au dernier moment, qu'enfin, ses jours et heures de travail étaient dépourvus de toute régularité, ce qui ajoutait à l'imprévisibilité voire l'incertitude de ses conditions de travail, que la circonstance selon laquelle le salarié aurait disposé d'emplois auprès d'autres sociétés de production ne démontre nullement qu'il ne se tenait pas à la disposition de l'employeur, qu'en effet, si les déclarations fiscales mentionnent, il est vrai, quelques rémunérations perçues auprès d'autres employeurs, la faible importance de celles-ci n'est pas de nature à remettre en cause la disponibilité que le salarié devait conserver prioritairement en faveur de l'employeur de qui il tirait la plus grande partie de ses salaires ; 

Mais la Cour de cassation ne partage pas le même avis, et casse et annule l’arrêt de la cour d’appel sur la condamnation de l’employeur à verser des rappels de salaire au titre des périodes interstitielles.

Ces rappels de salaires n’étant dus que sous réserve que le salarié puisse justifier s’être tenu à la disposition permanente de son employeur durant les périodes séparant chaque contrat, ce qui n’était pas le cas présentement.

Extrait de l’arrêt :

Qu'en se déterminant ainsi, alors que le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée à temps complet, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles séparant chaque contrat que s'il prouve s'être tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé, comme elle y était invitée, si le salarié établissait s'être effectivement tenu à la disposition de l'employeur durant les périodes pendant lesquelles il avait travaillé auprès d'autres sociétés de production, a privé sa décision de base légale ;
Et attendu que la cassation sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositifs critiqués par le premier moyen du pourvoi du salarié ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société (…)  à payer à M. Y... les sommes de 11 366 euros à titre de rappel de salaire, 1 136 euros de congés payés afférents, 28 924 euros à titre de prime d'ancienneté, 2 892 euros de congés payés afférents et 9 556 euros à titre de prime de fin d'année, l'arrêt rendu le 10 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°17-10275 pourvoi n°17-10392

Ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation aborde le cas des périodes interstitielles, nous rappelons 2 arrêts de la Cour de cassation (que vous pourrez consulter en détails sur notre site à l’aide des liens proposés) 

Arrêt du 16 septembre 2015

Au terme de 19 contrats CDD, un salarié obtient la requalification de son contrat en CDI.

Contrairement à l’avis de la cour d’appel, la Cour de cassation considère que le salarié n’ouvre pas droit au paiement des périodes interstitielles, faute de prouver que le salarié s’était tenu à disposition permanente de son employeur. 

Arrêt Cour de cassation du 16/09/2015, pourvoi n° 14-16277 

https://www.legisocial.fr/jurisprudences-sociales/605-cdd-requalifie-en-cdi-et-pour-les-periodes-interstitielles.html 

Arrêt du 13 avril 2016

Tout comme dans l’affaire que nous commentons aujourd’hui, faute pour le salarié de prouver qu’il s’était tenu à disposition permanente de son employeur, le paiement d’un rappel de salaires au titres des périodes interstitielles n’était pas dû.

Arrêt Cour de cassation du 13/04/2016, pourvoi n° 14-29899

https://www.legisocial.fr/jurisprudences-sociales/664-requalification-de-contrats-cdd-en-cdi-les-periodes-interstitielles-ne-sont-pas-automatiques-dues.html

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