Plusieurs avertissements sans modification de comportement du salarié justifient la rupture anticipée pour faute grave du CDD

Jurisprudence
Paie Sanctions

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité de basketteur professionnel par contrat à durée déterminée du 24 juillet 2013 au 30 juin 2014.

Ayant fait l'objet de 3 avertissements les 1er octobre, 16 novembre et 17 décembre 2013, son contrat de travail fait l'objet d'une rupture anticipée pour faute grave le 27 décembre 2013.

Mais le salarié saisit la juridiction prud’homale, estimant abusive la rupture de son contrat de travail. 

Dans son arrêt du 22 janvier 2016, la Cour d'appel de Lyon déboute le salarié de sa demande, ce dernier décidant alors de se pourvoir en cassation. 

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel. 

Les juges relèvent :

  • D’une part, que les 3 avertissements successivement notifiés par l'employeur entre le 1er octobre et le 17 décembre 2013 sont visés dans la lettre de rupture du contrat de travail à titre de rappel pour souligner que les dégradations sur le véhicule ont été commises alors que son employeur lui avait déjà rappelé la nécessité de se conformer à ses obligations professionnelles ;
  • Et d'autre part, que le salarié n'avait pas modifié son comportement malgré les sanctions qui lui avaient été préalablement infligées ;

En conséquence, c’est de bon droit que la cour d'appel a pu déduire de ses constatations que les faits reprochés constituaient une faute grave justifiant la rupture anticipée du contrat de travail. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'ayant relevé d'une part, que les trois avertissements successivement notifiés par l'employeur entre le 1er octobre et le 17 décembre 2013 sont visés dans la lettre de rupture du contrat de travail à titre de rappel pour souligner que les dégradations sur le véhicule ont été commises alors que son employeur lui avait déjà rappelé la nécessité de se conformer à ses obligations professionnelles, et d'autre part, que le salarié n'avait pas modifié son comportement malgré les sanctions qui lui avaient été préalablement infligées, la cour d'appel a pu déduire de ses constatations que les faits reprochés constituaient une faute grave justifiant la rupture anticipée du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°16-14195

Commentaire de LégiSocial

L’affaire présente est pour nous l’occasion de rappeler quelles sont les éléments pouvant conduire à la rupture anticipée d’un contrat CDD, les termes « démission » et « licenciement » étant exclusivement réservés aux contrats CDI.

Nous rappelons tout d’abord les 5 cas encadrés par le code du travail, en apportant un « focus » particulier sur la rupture anticipée pour faute grave, cas abordé dans l’affaire que nous commentons aujourd’hui.

Les 5 cas en bref

Les 5 cas sont les suivants : 

  1. A la demande du salarié et pour un CDI
  2. Accord des deux parties (employeur et salarié)
  3. Faute grave (ou lourde) du salarié
  4. Force majeure
  5. En cas d’inaptitude du salarié 

Cas n°3 : faute grave (ou lourde)

La rupture anticipée est possible en cas de faute grave ou lourde du salarié.

Le code du travail n’évoque que la faute grave, mais la faute lourde (plus conséquente que la faute grave est sous entendue).

Article L1243-1 

Modifié par LOI n°2014-1545 du 20 décembre 2014 - art. 6

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail. (…)

La notion de faute grave est identique, qu’il s’agisse de la rupture anticipée d’un CDD ou d’un licenciement pour faute.

Il est important de préciser que la rupture anticipée pour faute grave (ou lourde oblige l’employeur au respect des formalités prévues pour la procédure disciplinaire.

En d’autres termes, il doit y avoir :

  1. Convocation à l’entretien préalable ;
  2. Entretien préalable (en respectant le délai légal, 5 jours ouvrables pleins) ;
  3. Notification écrite et motivée de la sanction (respect du délai de 2 jours ouvrables). 

Article L1233-11

(…) L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. 

Article L1232-6

Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.

Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.

Nota :

Incidence du non-respect du délai d’un jour franc pour notifier la sanction.

L’inobservation du jour franc n’ouvre pas droit d’annuler la sanction quand le contrat visé est un CDD.

Cour de cassation du 12/11/2003 pourvoi 01-42130.

Cependant, le non respect du délai légal entrainera le versement de dommages-intérêts.

Cour de cassation du 27/06/2001, pourvoi 99-42216 

Information « bonus » 

Si la faute grave se produit ou est découverte au cours du renouvellement du CDD, l’indemnité de précarité due au titre du contrat initial doit être versée au salarié.

Cour de cassation du 9/04/2002, pourvoi 00-43521