Accuser à tort peut nuire gravement au contrat de travail !

Jurisprudence
Licenciement

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Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

La présente affaire concerne une salariée engagée le 13 septembre 2004 en qualité d'employée d'exploitation, dans une entreprise de transports touristiques en car.

Elle est licenciée par lettre du 7 septembre 2009 pour faute grave, pour accusations mensongères de harcèlement moral à l'encontre d'un supérieur hiérarchique.

De son côté, la salariée qui saisit la juridiction prud’homale, se plaignait d’un comportement à la fois coléreux, irrespectueux et insultant de son supérieur hiérarchique, démontrant ainsi des faits de harcèlement moral selon elle.

Extrait de l’arrêt :

2°/ que la salariée, qui se plaignait du comportement de M. Y..., son supérieur hiérarchique, a notamment produit une attestation de M. Z..., lequel a expressément fait état du comportement coléreux, irrespectueux et insultant de M. Y..., en ajoutant qu'il en avait fait part aux membres du comité d'entreprise et au secrétaire du CHSCT, mais en vain ;

La Cour de cassation, tout comme l’avait fait avant elle la cour d’appel, déboute la salariée de sa demande.

Les juges relèvent que les seuls faits qui étaient établis et de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement étaient justifiés par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement et que le syndrome « anxio-dépressif », en l'absence de constatations médicales antérieures au licenciement, était insuffisant à caractériser une situation de harcèlement moral et s'expliquait par des problèmes d'ordre personnel. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'appréciant la portée et la valeur des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a relevé que les seuls faits qui étaient établis et de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement étaient justifiés par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement et que le syndrome anxio-dépressif, en l'absence de constatations médicales antérieures au licenciement, était insuffisant à caractériser une situation de harcèlement moral et s'expliquait par des problèmes d'ordre personnel, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; (…)

Mais attendu que le moyen, irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en sa deuxième branche et inopérant en la première, en ce qu'il critique des motifs de l'arrêt destinés à caractériser la mauvaise foi de la salariée dans sa dénonciation de faits de harcèlement, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°13-22378

C’est un arrêt important que rend la Cour de cassation dans la présente affaire, qui pourrait être résumé comme le titre du présent article : « accuser à tort peut nuire au contrat de travail ! ».

Un arrêt à rapprocher d’un précédent

L’arrêt présent fait l’écho d’un précédent rendu en mars 2009, dans lequel la Cour de cassation avait apporté plusieurs précisions importantes que nous reprenons en détails.

Rappel du code du travail 

Les articles L 1152-1, L 1152-2 et L 1152-3 du code du travail indiquent que nul salarié, personne en formation ou en stage, ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour :

  • Avoir subi, refuser de subir des agissements de harcèlement moral ;
  • Ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. 

Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Article L1152-1

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Article L1152-2

Modifié par LOI n°2012-954 du 6 août 2012 - art. 7

Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Article L1152-3

Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Sauf mauvaise foi 

Dans son arrêt du 10 mars 2009, la Cour de cassation précise que les principes précités sont applicables, sauf mauvaise foi du salarié qui résulterait de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

Extrait de l’arrêt :

Vu les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; que selon le second, toute rupture de contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul ; qu'il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ;

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 10 mars 2009 N° de pourvoi: 07-44092

C’est bien ce que rappelle la Cour de cassation dans son arrêt que nous commentons aujourd’hui, les faits dénoncés ne sont pas établis, la mauvaise foi de la salariée est alors retenue.

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