La maladie ne suspend pas le délai de 2 mois pour sanctionner un salarié

Jurisprudence
Sanctions

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Un salarié est engagé le 1er août 2001en qualité de directeur d'exploitation.

Il est placé en arrêt de travail pour maladie du 4 mars au 30 avril 2008.

Convoqué à un entretien préalable le 5 mai 2008, il est finalement licencié pour manquements professionnels, le 19 mai 2008. 

Le salarié saisit la juridiction prud’homale estimant que la sanction qui lui est prononcée est frappée de prescription.

En effet, les faits qui lui sont reprochés et à l’appui desquels le licenciement est prononcé, ont été portés à la connaissance de son employeur le 29 février 2008. 

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié, estimant que la maladie et l’arrêt de travail de ce dernier, n’avait aucun effet ni interruptif ni suspensif, la prescription des faits était acquise à la date de l’engagement des poursuites disciplinaires par l’employeur. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui a constaté que les faits reprochés relatifs au manquement d'anticipation sur la commande de différents matériels et de décision de suspendre des travaux d'électricité étaient dès le 29 février 2008 connus de l'employeur, a exactement décidé que la maladie du salarié n'ayant d'effet ni interruptif ni suspensif, la prescription de ces faits était acquise à la date de l'engagement des poursuites disciplinaires le 5 mai 2008 ;

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rejetant de ce fait le pourvoi formé par l’employeur. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu, ensuite, que c'est pas une appréciation souveraine des éléments de faits et de preuve qu'elle a constaté que certains autres faits reprochés au salarié étaient soit prescrits soit non établis ; qu'exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°13-16546

Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques règles concernant la prescription des faits au titre desquels un employeur peut sanctionner un salarié. 

Un délai de 2 mois pour sanctionner des faits fautifs

Le code du travail donne une règle très précise concernant le délai pendant lequel l’employeur pourra prononcer une sanction vis-à-vis de son salarié.

Ainsi, un délai de 2 mois est possible, à partir du moment où l’employeur a connaissance des faits pour prononcer une sanction (blâme, avertissement ou licenciement éventuellement).

Article L1332-4 

Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Prescription des sanctions

De la même façon, un employeur ne peut prononcer une nouvelle sanction en rappelant des sanctions antérieures au-delà d’un délai de 3 ans.

Article L1332-5 

Aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction.

Confirmation de jurisprudences

Dans l’affaire présente, la Cour de cassation (tout comme l’avait fait avant elle la cour d’appel) confirme que l’arrêt de travail du salarié n’a pas pour effet de suspendre ou d’interrompre le délai de prescription de 2 mois.

Des arrêts similaires avaient déjà été prononcés : 

Arrêt du 13 juillet 1993 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu, d'abord qu'aux termes de l'article L. 122-44 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà de 2 mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que la maladie du salarié n'entraîne ni l'interruption ni la suspension de ce délai ;

Et attendu ensuite que la cour d'appel a relevé que les faits reprochés à la salariée, énoncés le 16 novembre 1987 par l'employeur à la demande de Mme X..., étaient les mêmes que ceux mentionnés dans une lettre du 7 octobre 1986 adressée par l'employeur à la salariée après le début de son arrêt pour maladie ; qu'elle a, à bon droit, décidé que ces faits, qui remontaient à plus de 2 mois, ne pouvaient justifier le licenciement prononcé le 23 octobre 1987 ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi. 

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 13 juillet 1993
N° de pourvoi: 91-42964

Arrêt du 17 janvier 1996 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'une procédure de licenciement, pour un motif non lié à l'accident ou à la maladie, peut être engagée au cours des périodes de suspension du contrat de travail provoquée par un accident du travail ou une maladie professionnelle ; que, dès lors, le délai de prescription de 2 mois prévu à l'article L. 122-44 du Code du travail pour engager une procédure disciplinaire n'est pas suspendu ni interrompu pendant la période de suspension du contrat de travail ;

D'où il suit que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait eu connaissance des faits fautifs reprochés au salarié le 24 février 1986 et n'avait engagé la procédure de licenciement que le 5 octobre 1987, soit après l'expiration du délai de 2 mois, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi. 

Cour de cassation chambre sociale  Audience publique du mercredi 17 janvier 1996
N° de pourvoi: 92-42031

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