Dépasser la durée maximale hebdomadaire ouvre droit à réparation

Jurisprudence
Paie Temps travail effectif

La durée maximale du travail hebdomadaire est fixée à 48 heures, ne saurait donc être débouté de sa demande en dommages-intérêts, le salarié qui réalise 50,45 h en exigeant qu’il démontre en quoi ces horaires chargés lui ont porté préjudice.

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Un salarié est engagé le 19 juin 2015, en qualité de chauffeur livreur.

Sa période d'essai est rompue par l'employeur, le 19 août 2015, en raison d'une insuffisance de résultats.

Mais le salarié saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes en remboursement de salaire trop-perçu et en paiement de dommages-intérêts. 

Il met notamment en avant le fait qu’il avait réalisé sur la semaine du 6 au 11 juillet 2015, une durée hebdomadaire de 50,45 h, excédant de ce fait la durée légale, ce qui lui ouvrait droit au paiement de dommages et intérêts.

La cour d'appel d'Orléans, par arrêt du 28 mars 2019, déboute le salarié de sa demande. 

Elle considère en effet que le salarié n’était pas en mesure de démontrer très exactement en quoi ces horaires chargés lui avaient porté préjudice 

La Cour de cassation n’approuve pas l’arrêt de la cour d’appel, qu’elle casse et annule, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Bourges.

Elle confirme à cette occasion que : 

La durée maximale du travail hebdomadaire est fixée à 48 heures.

  • Ne saurait être débouté de sa demande en dommages-intérêts pour violation de la durée maximale du travail ;
  • Le salarié pour lequel a été constaté une durée de 50,45 heures durant la semaine du 6 au 11 juillet 2015 ;
  • En exigeant que ce dernier devait démontrer très exactement en quoi ces horaires chargés lui ont porté préjudice ;
  • Alors que le dépassement, en lui-même, de la durée maximale ouvre droit à réparation.

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3121-35, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprété à la lumière de l'article 6 b) de la directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 :

  1. Aux termes du texte susvisé, au cours d'une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures.
  2. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire fixée à l'article 6, sous b), de la directive 2003/88 constitue, en tant que tel, une violation de cette disposition, sans qu'il soit besoin de démontrer en outre l'existence d'un préjudice spécifique (CJUE, 14 octobre 2010, C-243/09, Fuß c. Stadt Halle, point 53). Cette directive poursuivant l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant, le législateur de l'Union a considéré que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire, en ce qu'il prive le travailleur d'un tel repos, lui cause, de ce seul fait, un préjudice dès lors qu'il est ainsi porté atteinte à sa sécurité et à sa santé (CJUE,14 octobre 2010, C-243/09, Fuß c. Stadt Halle, point 54). La Cour de justice de l'Union européenne a précisé que c'est au droit national des États membres qu'il appartient, dans le respect des principes d'équivalence et d'effectivité, d'une part, de déterminer si la réparation du dommage causé à un particulier par la violation des dispositions de la directive 2003/88 doit être effectuée par l'octroi de temps libre supplémentaire ou d'une indemnité financière et, d'autre part, de définir les règles portant sur le mode de calcul de cette réparation (CJUE, 25 novembre 2010, Fuß c. Stadt Halle, C-429/09, point 94).
  3. Pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour violation de la durée maximale du travail, l'arrêt, après avoir constaté que le salarié avait travaillé 50,45 heures durant la semaine du 6 au 11 juillet 2015, retient que celui-ci doit démontrer très exactement en quoi ces horaires chargés lui ont porté préjudice et, qu'en l'état des éléments soumis, ce préjudice n'est pas suffisamment démontré.
  4. En statuant ainsi, alors que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [S] de sa demande en dommages-intérêts pour violation de la durée maximale de travail, l'arrêt rendu le 28 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°20-21636

Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques informations concernant la durée maximale hebdomadaire.

Les informations qui vous sont ici communiquées sont extraites de notre fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique et consultable au lien suivant : 

2 catégories de durées maximales

En ce qui concerne la durée maximale quotidienne, il convient de distinguer :

  1. La durée maximale absolue ;
  2. Et la durée maximale relative.

Durée maximale « absolue » 

Cette durée maximale « absolue » est confirmée par l’article L 3121-20 à 48 heures par semaine.

Article L3121-20 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Au cours d'une même semaine, la durée maximale hebdomadaire de travail est de quarante-huit heures.

L’article L 3121-21 modifié présentement par la loi travail confirme les dispositions complémentaires suivantes :

  • Le dépassement de cette durée maximale peut être autorisé par l'autorité administrative, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, sans toutefois que ce dépassement puisse avoir pour effet de porter la durée du travail à plus de 60 heures par semaine ;
  • Ce dépassement est prévu en cas de circonstances exceptionnelles et pour la durée de celles-ci ;
  • Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, s'ils existent, donnent leur avis sur les demandes d'autorisation formulées à ce titre. Cet avis est transmis à l'agent de contrôle de l'inspection du travail.

Article L3121-21

Modifié par Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 - art. 4

En cas de circonstances exceptionnelles et pour la durée de celles-ci, le dépassement de la durée maximale définie à l'article L. 3121-20 peut être autorisé par l'autorité administrative, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, sans toutefois que ce dépassement puisse avoir pour effet de porter la durée du travail à plus de soixante heures par semaine. Le comité social et économique donne son avis sur les demandes d'autorisation formulées à ce titre. Cet avis est transmis à l'agent de contrôle de l'inspection du travail.

Durée maximale hebdomadaire « relative » 

La durée maximale « relative » est fixée à 44 heures, sur une période quelconque de 12 semaines consécutives, sauf cas de dérogations prévus aux articles L 3121-23 à L 3121-25 que nous abordons ci-après.

Article L3121-22 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

La durée hebdomadaire de travail calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ne peut dépasser quarante-quatre heures, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3121-23 à L. 3121-25. 

Dans le cadre de la négociation collective, il peut être dérogé à la durée maximale relative, à condition que ce dépassement n'ait pas pour effet de porter cette durée, calculée sur une période de 12 semaines, à plus de 46 heures.

Cette dérogation peut être prévue par :

  • Convention ;
  • Accord d'entreprise ou d'établissement ;
  • Ou, à défaut, par convention ou un accord de branche

Article L3121-23 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut prévoir le dépassement de la durée hebdomadaire de travail de quarante-quatre heures calculée sur une période de douze semaines consécutives, à condition que ce dépassement n'ait pas pour effet de porter cette durée, calculée sur une période de douze semaines, à plus de quarante-six heures.

Enfin dans le cadre des « dispositions supplétives », et au sein des articles L 3121-24 à L 3121-26, les dérogations possibles sont prévues et sont à confirmer par décret à venir :

  • À défaut d'accord collectif, le dépassement de la durée maximale hebdomadaire « relative » est autorisé par l'autorité administrative dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, dans la limite d'une durée totale maximale de 46 heures.
  • À titre exceptionnel, dans certains secteurs, dans certaines régions ou dans certaines entreprises, le dépassement de la durée maximale de 46 heures prévue aux articles L. 3121-23 et L. 3121-24 peut être autorisé pendant des périodes déterminées, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.

Nota : le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, s'ils existent, donnent leur avis sur les demandes d'autorisation formulées auprès de l'autorité administrative en application des articles L. 3121-24 et L. 3121-25. Cet avis est transmis à l'agent de contrôle de l'inspection du travail.

Article L3121-24 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

A défaut d'accord prévu à l'article L. 3121-23, le dépassement de la durée maximale hebdomadaire prévue à l'article L. 3121-22 est autorisé par l'autorité administrative dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, dans la limite d'une durée totale maximale de quarante-six heures.

Article L3121-25 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

A titre exceptionnel, dans certains secteurs, dans certaines régions ou dans certaines entreprises, le dépassement de la durée maximale de quarante-six heures prévue aux articles L. 3121-23 et L. 3121-24 peut être autorisé pendant des périodes déterminées, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.

Article L3121-26

Modifié par Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 - art. 4

Le comité social et économique donne son avis sur les demandes d'autorisation formulées auprès de l'autorité administrative en application des articles L. 3121-24 et L. 3121-25. Cet avis est transmis à l'agent de contrôle de l'inspection du travail.

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