Congés payés et maladie : l’avis du Conseil d’État

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Alors que le Gouvernement travaille actuellement sur une réforme du code du travail, le Conseil d’État vient d’émettre un avis sur la réforme souhaitable en référence aux arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre 2023.

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Les arrêts de la Cour de cassation

A l’occasion de 4 arrêts, très importants, rendus le 13 septembre 2023, la Cour met en conformité le droit français avec le droit européen en matière de congés payés. 

De façon synthétique, ces 4 arrêts peuvent être présentés comme suit : 

Thématiques

Dispositions actuelles

Arrêt de la Cour de cassation

Références

CP et arrêt maladie (hors maladie professionnelle)

Sauf dispositions conventionnelles ou usages plus favorables :

  • Durant un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle ;
  • Le salarié n’acquiert aucun droit aux congés payés.
  • La Cour de cassation assimile à une période travail effectif, permettant l’acquisition d’un droit aux congés payés, les arrêts de travail maladie

Arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2023, pourvoi n° 22-17.340

CP et AT/MP

Sauf dispositions conventionnelles ou usages plus favorables, en application de l’article L 3141-5 du code du travail (5°) :

  • Durant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie non professionnelle ;
  • Le salarié continue à faire l’acquisition de congés payés, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an.
  • La Cour de cassation ne permet pas de limiter à une durée d’un an, la période durant laquelle le salarié en arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie professionnelle, continue à acquérir un droit aux congés payés.

Arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2023, pourvoi n° n° 22-17.638

CP et délai de prescription

  • En matière de CP, un délai de prescription de 3 ans, par ailleurs prévu en matière de paiement de salaires, s’applique.

(LOI no 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, JO du 16 juin 2013, article L 3245-1 code du travail)

Le délai de prescription débute :

  • Au moment où l’employeur a pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congé payé.

Arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2023, pourvoi n° 22-10.529

CP et congé parental

Selon le Conseil de prud’hommes :

  • La situation des salariés en arrêt maladie ou accident de travail n'est pas comparable à celle des salariés en congé parental.
  • Lorsque le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l'année de référence en raison de l'exercice de son droit au congé parental ;
  • Les congés payés acquis à la date du début du congé parental doivent être reportés après la date de reprise du travail.

Arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2023, pourvoi n° 22-14.043

Décision du Conseil constitutionnel

Le Conseil Constitutionnel s'est prononcé le 8 février sur la constitutionnalité des dispositions du Code du Travail relative à l'acquisition des congés payés pendant un arrêt de travail pour maladie non professionnelle. 

La Cour de cassation, suite à son revirement jurisprudentiel du 13 septembre 2023, avait en effet soumis au Conseil Constitutionnel, le 15 novembre 2023, deux questions prioritaires de constitutionnalité : Elle lui demandait de dire si les articles du Code du Travail français, à défaut d’être en phase avec les règles européennes, sont conformes à la Constitution française. 

Dans sa décision du 8 février 2024, le Conseil constitutionnel refuse de censurer ces dispositions, estimant qu'elles n'étaient pas contraires à la Constitution et notamment au droit à la santé et au doit au repos.

Conseil Constitutionnel, 8 février 2024, QPC, n° 2023-1079.

L’avis du Conseil d’État

Ainsi que nous vous l’indiquons en présentation, le Conseil d’État vient d’émettre un avis sur la réforme qui devrait arriver prochainement.

De cet avis, nous pouvons retenir les 4 points essentiels suivants :

Point numéro 1 : garantir un droit de 4 semaines 

Dans son avis du 13 mars 2024, le Conseil d’État considère que dans le cadre de la réforme à venir :

  • Le code du travail pourrait être modifié afin de garantir un droit aux congés payés pour les salariés en arrêt de travail pour maladie (hors maladie) mais dans la limite de 4 semaines par période de référence.

Concrètement, nous pourrions avoir la situation suivante :

  1. Le salarié, présent durant la période de référence, ferait (NDLR : sans changement bien entendu) l’acquisition d’un droit aux congés payés, à raison de 2,5 jours ouvrables/mois;
  2. Le salarié en arrêt de maladie ordinaire, durant la période de référence, ferait l’acquisition d’un droit aux congés payés, à raison de 2 jours ouvrables/mois.

Point numéro 2 : traitement des « situations passées » 

  • Le Conseil d’État considère que le législateur pourrait donner à la réforme des droits aux congés payés un « effet rétroactif » en limitant cette rétroactivité au 1er décembre 2009 (NDLR : date d’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, qui a permis de rendre opposable l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE)

Point numéro 3 : report CP et arrêt maladie 

A ce niveau, le Conseil d’État considère que le législateur devrait plafonner :

  • A 15 mois le report des congés payés, acquis mais non utilisés du fait de l’expiration de la période de prise des congés payés durant un arrêt maladie. 

Cette période de 15 mois débuterait à la reprise du travail par le salarié concerné.

Ce même plafonnement de 15 mois trouverait à s’appliquer en cas :

  • D’arrêt maladie de longue durée, s’étalant donc sur plusieurs périodes de référence ;
  • Avec comme point de départ de ce délai : la fin de la période d’acquisition des congés payés.

 

Point numéro 4 : délai de prescription 

A ce niveau, qui intéresse un bon nombre d’employeurs, le Conseil d’État considère qu’une période de prescription différente, selon la situation du salarié, devrait être envisagée :

Situation 1 : salarié ayant quitté l’entreprise au moment de la nouvelle législation 

  • Une période de prescription de 3 ans pourrait s’appliquer.

Situation 2 : salarié présent au moment de la nouvelle législation

  • Pour les salariés toujours présents dans l’entreprise au moment du changement légal, le délai serait fixé à 2 ans, à compter de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions légales. 

Références 

Conseil d’État : Avis portant sur la mise en conformité des dispositions du code du travail en matière d’acquisition de congés pendant les périodes d’arrêt maladie, du 13 mars 2024

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