Pas de convention forfait jours si le salarié est soumis à un planning horaire

Jurisprudence
Convention forfait

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Cet article a été publié il y a 6 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

La présente affaire concerne plusieurs salariés d’une société qui exploite un casino.

Ils sont tous employés en qualité de membres du comité de direction des machines à sous avec la qualification de cadre niveau VI, leur contrat de travail précisant qu'ils ont la qualité de cadre autonome et comporte une clause de forfait en jours.

Les salariés saisissent la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification de leur statut de cadre autonome en celui de cadre intégré, et la condamnation en conséquence de l'employeur à leur payer des rappels d'heures supplémentaires.

Un des salariés est licencié en cours de procédure. 

La cour d’appel puis la Cour de cassation donnent raison aux salariés.

Soumis à un planning contraignant imposant leur présence au sein de l'entreprise à des horaires prédéterminés, l’employeur ne pouvait recourir à une convention de forfait jours.

Des heures supplémentaires pouvaient donc être attribuées aux salariés dans la présente affaire.

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que les salariés étaient soumis à un planning contraignant imposant leur présence au sein de l'entreprise à des horaires prédéterminés, ce qui est antinomique avec la notion de cadre autonome, en a exactement déduit que l'employeur ne pouvait recourir à une convention de forfait en jours et qu'il y avait lieu de leur appliquer le droit commun de la durée du travail, lequel suppose un décompte des heures supplémentaires sur la base des heures de travail réellement effectuées ;

Sur le premier moyen des pourvois des salariés, ci-après annexé :

Attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments produits tant par le salarié que par l'employeur que la cour d'appel, sans encourir les griefs du moyen, a évalué le nombre d'heures supplémentaires effectuées par les salariés et fixé en conséquence les créances salariales s'y rapportant ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, propre à M. Y... :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Cour de cassation du , pourvoi n°15-17568 15-17569 15-17570 15-17571 15-17572 15-17573 15-18004 15-18005 15-18006 15-18007 15-18008 15-18009

Nous profitons de la présente affaire pour rappeler quelques notions importantes concernant les conventions de forfait annuel en jours, depuis la loi travail.

Forfaitisation du temps de travail

Outre le changement de numérotation, le code du travail propose également une nouvelle présentation des conventions de forfait. 

C’est ainsi que les articles L 3121-53 à L 3121-55 confirment les points suivants :

  • La durée du travail peut être forfaitisée en heures ou en jours ;
  • Le forfait en heures est hebdomadaire, mensuel ou annuel ;
  • Le forfait en jours est annuel ;
  • La forfaitisation de la durée du travail doit faire l'objet de l'accord du salarié et d'une convention individuelle de forfait établie par écrit. 

Article L3121-53 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

La durée du travail peut être forfaitisée en heures ou en jours dans les conditions prévues aux sous-sections 2 et 3 de la présente section.

Article L3121-54 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Le forfait en heures est hebdomadaire, mensuel ou annuel. Le forfait en jours est annuel.

Article L3121-55

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

La forfaitisation de la durée du travail doit faire l'objet de l'accord du salarié et d'une convention individuelle de forfait établie par écrit.

Mise en place

Quelle que soit la nature de la convention de forfait, heures ou jours, le nouvel article L 3121-63 inséré dans le code du travail dans le cadre du champ de la négociation collective confirme que la mise en place d’une convention de forfait est réalisé par :

  • Un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ;
  • Ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. 

Article L3121-63 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Les forfaits annuels en heures ou en jours sur l'année sont mis en place par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.

5 clauses obligatoires

Un nouvel article L 3121-64 est créé par la loi travail.

Il fixe désormais 5 clauses obligatoires (au lieu de 3 avant la loi) comme suit :

  1. Les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait ;
  2. La période de référence du forfait, qui peut être l’année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;
  3. Le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de 218 jours s’agissant du forfait en jours ;
  4. Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;
  5. Les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait. 

Article L3121-64 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

I.-L'accord prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année détermine :

1° Les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, dans le respect des articles L. 3121-56 et L. 3121-58 ;

2° La période de référence du forfait, qui peut être l'année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;

3° Le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de deux cent dix-huit jours s'agissant du forfait en jours ;

4° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;

5° Les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait.

II.-L'accord autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine :

1° Les modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

2° Les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise ;

3° Les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion prévu au 7° de l'article L. 2242-8.

L'accord peut fixer le nombre maximal de jours travaillés dans l'année lorsque le salarié renonce à une partie de ses jours de repos en application de l'article L. 3121-59. Ce nombre de jours doit être compatible avec les dispositions du titre III du présent livre relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et aux jours fériés chômés dans l'entreprise et avec celles du titre IV relatives aux congés payés.

Salariés concernés

Peuvent conclure une convention individuelle de forfait en heures sur l'année :

  • Les cadres dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;
  • Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Renonciation à des jours de repos

  • Tout salarié peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire, cet accord est alors établi par écrit.
  • Un avenant à la convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être inférieur à 10 %. Cet avenant est valable pour l'année en cours et ne peut être reconduit de manière tacite. 

Le nouvel article L 3121-66, proposé dans le champ des « dispositions supplétives) précise qu’à défaut de précision dans l’accord collectif, le nombre maximal de jours travaillés dans l’année est fixé à 235. 

Charge de travail

Dans le cadre d’une convention de forfait annuel en jours, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail. 

Rémunération 

Lorsqu'un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, nonobstant toute clause contraire, conventionnelle ou contractuelle, saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, eu égard notamment au niveau du salaire pratiqué dans l'entreprise, et correspondant à sa qualification.  

Durées maximales

Les salariés sous convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives :

  • A la durée légale hebdomadaire ;
  • A la durée quotidienne maximale de travail ;
  • Aux durées hebdomadaires maximales de travail. 

6 nouveaux articles sont insérés dans le code du travail, articles L 3121-58 à L 3121-62 et L 3121-66, par la loi travail. 

Article L3121-58 

 Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l'année, dans la limite du nombre de jours fixé en application du 3° du I de l'article L. 3121-64 :

1° Les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;

2° Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Article L3121-59 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire. L'accord entre le salarié et l'employeur est établi par écrit.

Un avenant à la convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être inférieur à 10 %. Cet avenant est valable pour l'année en cours. Il ne peut être reconduit de manière tacite.

Article L3121-60 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

L'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.

Article L3121-61 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Lorsqu'un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, nonobstant toute clause conventionnelle ou contractuelle contraire, saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, eu égard notamment au niveau du salaire pratiqué dans l'entreprise, et correspondant à sa qualification.

Article L3121-62 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives :

1° A la durée quotidienne maximale de travail effectif prévue à l'article L. 3121-18 ;

2° Aux durées hebdomadaires maximales de travail prévues aux articles L. 3121-20 et L. 3121-22 ;

3° A la durée légale hebdomadaire prévue à l'article L. 3121-27.

Article L3121-66 

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

En cas de renonciation, par le salarié, à des jours de repos en application de l'article L. 3121-59 et à défaut de précision dans l'accord collectif mentionné à l'article L. 3121-64, le nombre maximal de jours travaillés dans l'année est de deux cent trente-cinq.

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