La rupture anticipée d’un CDD par une clause du contrat n’est pas licite

Jurisprudence
CDD

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Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

C’est une affaire assez particulière que nous abordons aujourd’hui.

Un joueur basket-ball professionnel est engagé le 26 juin 2009 pour la durée d'une saison sportive.

Un nouvel engagement est conclu pour une durée de 2 saisons sportives avec une entrée en vigueur le 1er septembre 2010.

Selon un avenant du 1er septembre 2010 les parties ont prévoient qu'« en cas d'absences répétées et injustifiées du joueur lors d'entraînement, réunions, opérations de relations publiques, voire matchs (plus de trois absences injustifiées), les deux parties s'accordent sur une possibilité d'annulation de la deuxième saison au contrat, par envoi d'un courrier simple, avant le 30 avril 2011. De même, le joueur a la faculté de choisir d'interrompre le contrat à la fin de la première saison, par l'envoi d'un courrier simple avant le 30 avril 2011 ».

Par lettre du 28 avril 2011, l'association qui a engagé le basketteur fait application de cet avenant et informe le joueur qu'elle met un terme à la relation contractuelle.

A la suite de quoi, le joueur saisit la juridiction prud'homale, estimant que sauf accord des parties, le contrat CDD ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail.

Ainsi selon lui, il résulte de ces dispositions d'ordre public qu’un salarié ne peut par avance accepter la rupture du contrat par l'employeur pour d'autres causes que celles prévues par ce texte.

Dans un premier temps, la cour d’appel déboute le salarié de sa demande, estimant que l’avenant du 1er septembre 2010 constituait un accord amiable en accord avec les dispositions légales et plus précisément l’article L 1243-1 du code du travail, permettant la rupture anticipée par accord des deux parties. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour dire que la rupture du contrat de travail était régulière et débouter le joueur de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt retient que l'avenant constitue un accord amiable conformément à l'article L. 1243-1 du code du travail puisqu'il offre la faculté à chacune des deux parties, le salarié et l'employeur, de mettre fin au contrat de travail avant son terme en fixant des conditions particulières pour l'employeur ; que l'existence de ces conditions restrictives pesant sur le seul employeur ne caractérise pas une clause résolutoire prohibée permettant à celui-ci seulement de rompre le contrat par anticipation avant l'échéance du terme puisque la faculté est également ouverte au salarié, et ce sans motif ;

La Cour de cassation ne partage pas le même avis, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel renvoyant les parties devant une nouvelle cour d’appel.

Les juges considèrent en l’espèce qu’une clause permettant la rupture du contrat pour d’autres clauses que celle prévues légalement n’était pas licite, peu importe que le salarié dispose d’une faculté de rupture plus large.

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la clause résolutoire stipulée à l'avenant permettait à l'employeur de rompre le contrat pour d'autres causes que celles prévues limitativement par l'article L. 1243-1 du code du travail, peu important que le salarié ait disposé d'une faculté de rupture plus large, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail par l'employeur est régulière et qu'il déboute M. X... de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 11 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-26172

La présente affaire est pour nous l’occasion de rappeler que 5 cas de ruptures anticipées autorisées existent en matière de contrat CDD.

Rappelons ainsi les cas autorisés comme suit : 

A la demande du salarié et pour un CDI

Le salarié à qui un autre employeur propose la conclusion d’un contrat CDI, a toute faculté de rompre le contrat CDD.

Le salarié doit alors respecter un délai qui est de:  

Si le CDD a été conclu avec un terme précis : 

1 jour par semaine (le calcul se fait sur la durée du contrat) avec un maximum de 2 semaines de délai. 

Exemple 1 :

  • le salarié C vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ;
  • il est actuellement en contrat CDD de 8 semaines ;
  • il travaille 5 jours par semaine, du lundi au vendredi inclus. 

Le délai à observer au maximum sera de 8 jours, il est inférieur à la durée maximum de 10 jours. 

Exemple 2 :

  • le salarié D vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ;
  • il est actuellement en contrat CDD de 12 semaines ;
  • il travaille 5 jours par semaine, du lundi au vendredi inclus. 

Le délai à observer au maximum sera de 10 jours, car le calcul initial indiquait 12 jours mais un plafonnement à 2 semaines est à respecter. 

Si le CDD a été conclu sans terme précis (cas d’un CDD de remplacement par exemple)  

1j/semaine (calcul sur le travail effectué) avec un maximum de 2 semaines de délai.   

Exemple :

  • le salarié D vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ;
  • il est actuellement en contrat CDD de 8 semaines ;
  • il a réalisé déjà 3 semaines de contrat. 

Le délai à observer au maximum sera de 3 jours, il est inférieur à la durée maximum de 10 jours. 

Bien entendu rien n’interdit à l’employeur d’octroyer un délai moindre avec l’accord du salarié.

Article L1243-2

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 1243-1, le contrat de travail à durée déterminée peut être rompu avant l'échéance du terme à l'initiative du salarié, lorsque celui-ci justifie de la conclusion d'un contrat à durée indéterminée.

Sauf accord des parties, le salarié est alors tenu de respecter un préavis dont la durée est calculée à raison d'un jour par semaine compte tenu :

1° De la durée totale du contrat, renouvellement inclus, lorsque celui-ci comporte un terme précis ;

2° De la durée effectuée lorsque le contrat ne comporte pas un terme précis.

Le préavis ne peut excéder deux semaines. 

Accord des deux parties (employeur et salarié) 

Article L1243-1 

Modifié par LOI n°2014-1545 du 20 décembre 2014 - art. 6

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail.

Lorsqu'il est conclu en application du 6° de l'article L. 1242-2, le contrat de travail à durée déterminée peut, en outre, être rompu par l'une ou l'autre partie, pour un motif réel et sérieux, dix-huit mois après sa conclusion puis à la date anniversaire de sa conclusion.

Nota : à notre sens, un écrit devrait être rédigé, précisant notamment le versement de l’indemnité de précarité, dont l’exclusion n’est d’ailleurs pas spécifiquement prévue par le code du travail.

L’article L 1243-1 stipule des conditions particulières concernant le contrat CDD à objet défini, que l’article spécifiquement réalisé à ce propos vous expose en détails. 

Faute grave (ou lourde) du salarié

La rupture anticipée est possible en cas de faute grave ou lourde du salarié.

Le code du travail n’évoque que la faute grave, mais la faute lourde (plus conséquente que la faute grave est sous entendue).

Article L1243-1 

Modifié par LOI n°2014-1545 du 20 décembre 2014 - art. 6

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail. (…)

La notion de faute grave est identique, qu’il s’agisse de la rupture anticipée d’un CDD ou d’un licenciement pour faute.

Il est important de préciser que la rupture anticipée pour faute grave (ou lourde oblige l’employeur au respect des formalités prévues pour la procédure disciplinaire.

En d’autres termes, il doit y avoir :

  1. Convocation à l’entretien préalable ;
  2. Entretien préalable (en respectant le délai légal, 5 jours ouvrables pleins) ;
  3. Notification écrite et motivée de la sanction (respect du délai de 2 jours ouvrables).

Force majeure

La rupture anticipée est admissible en cas de force majeure (incendie usine,..) évènement imprévisible, insurmontable et étranger à l'entreprise qui l'invoque.

Toutefois l’article L 1243-4 du code du travail indique que le salarié aura droit à une indemnité compensatrice équivalant aux rémunérations qu’il aurait perçu jusqu’au terme du contrat en cas de sinistre.

Il faut bien comprendre le sens retenu pour « force majeure ». 

C’est une situation à la fois imprévisible, non invocable à l’entreprise et qui n’aura pas tendance à se renouveler. 

Article L1243-4

Modifié par LOI n°2011-525 du 17 mai 2011 - art. 49

La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8.

Toutefois, lorsque le contrat de travail est rompu avant l'échéance du terme en raison d'un sinistre relevant d'un cas de force majeure, le salarié a également droit à une indemnité compensatrice dont le montant est égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat. Cette indemnité est à la charge de l'employeur.

En cas d’inaptitude du salarié 

Si l’inaptitude est d’origine professionnelle 

Le régime qui s’applique est analogue à celui d’un salarié en contrat CDI.

L’employeur devra donc :

  • Rechercher les possibilités de reclassement ;
  • Si la rupture n’est pas prononcée dans le délai d’un mois suivant la reconnaissance d’inaptitude prononcée par le médecin du travail, le salarié doit percevoir à nouveau sa rémunération ;
  • L’employeur doit verser lors de la rupture une indemnité qui ne peut être inférieure au double de l’indemnité de licenciement et qui se cumule avec l’indemnité de précarité (à la différence des autres cas de ruptures anticipées). 

Si l’inaptitude n’est pas d’origine professionnelle 

Le régime qui s’applique alors est le suivant : 

  • Versement d’une indemnité de rupture qui ne peut être inférieure à l’indemnité de licenciement et qui se cumule avec l’indemnité de précarité ;
  • La procédure concernant les propositions de reclassement ne s’appliquent pas selon les termes du Code du travail MAIS une réponse ministérielle du 1/11/2011 indique que le reclassement doit être respecté même si l’inaptitude n’est pas d’origine professionnelle.

Article L1243-1 

Modifié par LOI n°2014-1545 du 20 décembre 2014 - art. 6

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail. (…)

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