Un faible retard dans l’envoi d’arrêts de travail, ne justifie pas un licenciement pour faute grave

Jurisprudence
Indemnité de licenciement

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Cet article a été publié il y a 11 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Un salarié est engagé en qualité de conducteur poids lourd le 1er avril 2005. 

Le 29 septembre 2008, il est licencié pour faute grave en raison d’absences injustifiées et de remise tardive de certificats d’arrêts de travail. 

Le salarié, estimant son licenciement injustifié, saisit la juridiction prud’homale de diverses demandes indemnitaires. 

La cour d’appel puis la Cour de cassation donnent raison au salarié. 

Les juges de la Cour de cassation relèvent notamment que seuls 3 arrêts de travail avaient justifiées la rupture pour faute grave par l’employeur.

De plus, les retards étaient de :

  • Un jour pour le premier arrêt ;
  • Deux jours pour le deuxième ;
  • Trois jours pour le troisième.

Ces retards ne permettaient pas un licenciement pour faute grave, et les juges précisent que le licenciement était intervenu sans cause réelle et sérieuse.

Extrait de l’arrêt

Mais attendu qu'ayant constaté que seuls trois arrêts pour maladie avaient été justifiés auprès de l'employeur avec respectivement un, deux et trois jours de retard, la cour d'appel a pu décider que cette faute n'était pas d'une gravité telle qu'elle empêchait le maintien du salarié dans l'entreprise et, exerçant le pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, a estimé que le licenciement intervenu était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°11-14746

Profitons de cette affaire pour rappeler quelques notions importantes concernant les arrêts de travail et les obligations du salarié. 

Délai de prévenance

En cas d’absence en raison de la maladie, le salarié doit prévenir son employeur, le délai prévu est fixé soit: 

  • Par convention collective ;
  • Selon le règlement intérieur ou les usages ;
  • Par défaut, dans un délai de 48 heures (accord interprofessionnel de 1977 sur la mensualisation).

Dans l’affaire présente, le délai de prévenance prévu par la convention collective était de 3 jours. 

Extrait de l’arrêt

Attendu qu'il convient d'appliquer les dispositions de la convention collective applicable relative aux absences régulières qui prévoient que le salarié doit en justifier auprès de l'employeur « au plus tard dans les trois jours » ;

Absence injustifiée

De ce fait, pouvait être considérée comme une absence injustifiée, celle pour laquelle le salarié n’avait pas respecté le délai de prévenance conventionnel. 

La Cour de cassation fait une étude très précise à ce sujet, en comparant pour chaque arrêt la date à laquelle le salarié avait averti son employeur avec le délai que le salarié se devait de respecter. 

L’étude donne le résultat suivant, en rappelant que les « retards constatés » avaient été utilisés par l’employeur pour motiver la rupture pour faute grave.

Premier arrêt 

  • L’absence débute le 28/07/2008 ;
  • L’employeur est averti le 29/07/2008 ;
  • Le délai prévu par la convention collective était respecté.

Extrait de l’arrêt

Attendu qu'il ressort de la lettre de licenciement elle-même que le salarié a respecté ce délai pour l'absence ayant débuté le 28 juillet 2008 puisque l'employeur indique expressément avoir reçu un certificat médical d'arrêt maladie le lendemain, soit le 29 juillet 2008 ;

Deuxième arrêt

Ce sont en fait 4 arrêts qui interviennent dans un laps de temps assez court.

  • L’absence débute le 3/08/2008 ;
  • L’employeur est averti le 6/08/2008.  
  • L’absence débute le 18/08/2008 ;
  • L’employeur est averti le 21/08/2008. 
  • L’absence débute le 15/09/2008 ;
  • L’employeur est averti le 18/09/2008. 
  • L’absence débute le 25/09/2008 ;
  • L’employeur est averti le 25/09/2008. 

Pour tous ces arrêts, on constatera que le délai conventionnel est bel et bien respecté. 

Extrait de l’arrêt

Attendu que le salarié a également respecté ce délai pour l'absence du 3 au 10 août 2008 (employeur averti le 6 août), pour celle du 18 au 24 août (employeur averti le 21 août 2008), celle du 15 au 22 septembre 2008 (employeur averti le 18 septembre) et celle du 25 au 30 septembre 2008 (employeur averti le 25 septembre) ;


Troisième arrêt

Sont cités 2 arrêts pour lesquels le délai n’a pas été respecté : 

  • L’absence débute le 10/08/2008 ;
  • L’employeur est averti le 14/08/2008 ;
  • Retard : 1 jour. 
  • L’absence débute le 25/08/2008 ;
  • L’employeur est averti le 30/08/2008 ;
  • Retard : 2 jours.  
  • L’absence débute le 3/09/2008 ;
  • L’employeur est averti le 9/09/2008 ;
  • Retard : 3 jours.

Extrait de l’arrêt

Attendu que le salarié n'a pas respecté le délai de trois jours pour les absences du 10 au 18 août 2008 (employeur averti le 14 août), du 25 au 30 août 2008 (employeur averti le 30 août) et du 3 au 14 septembre 2008 (employeur averti le 9 septembre) ;

Licenciement sans cause réelle et sérieuse

Dans cette affaire, le licenciement pour faute grave est rejeté.

Circonstance aggravante, la Cour de cassation considère que le licenciement a été prononcé sans cause réelle et sérieuse. 

Les conséquences financières ne sont pas négligeables, car l’employeur doit verser au salarié :

  • 4.244 € au titre de l’indemnité de préavis ;
  • 424,40 € au titre des congés payés y afférents (1/10ème de l’indemnité de préavis) ;
  • 1.480,68 € au titre de l’indemnité de licenciement (la faute grave privant le salarié du paiement de cette indemnité de rupture) ;
  • 13.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Extrait de l’arrêt

Attendu que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer les sommes de 4.244 euros au titre de l'indemnité de préavis, 424,40 euros au titre des congés payés y afférents, 1.480,68 euros au titre de l'indemnité de licenciement, 13.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;

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