Réforme de 2010
La réforme de 2010, qui a relevé l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, a profondément modifié la fin de carrière de nombreux salariés. Si son objectif principal était d’assurer la soutenabilité du système de retraite, elle a aussi eu des répercussions sur d’autres branches de la protection sociale, notamment sur l’Assurance chômage.
Pour mesurer ces interactions, l’Unédic s’est associée à l’Institut des politiques publiques (IPP) afin d’analyser l’impact réel de cette réforme sur les dépenses et les recettes du régime d’assurance chômage. Le rapport intermédiaire publié en novembre 2025 livre des premiers enseignements : le recul de l’âge légal a certes modifié les comportements d’emploi mais son effet financier global pour l’Unédic demeure limité.
Seniors plus longtemps en activité… oui mais
Lorsque la retraite recule, deux effets inverses apparaissent.
D’un côté, davantage de seniors prolongent leur activité, générant des cotisations supplémentaires pour l’Assurance chômage. De l’autre, certains actifs, contraints de rester sur le marché du travail sans pouvoir partir à la retraite, se retrouvent au chômage et perçoivent des allocations plus longtemps.
L’IPP a comparé les parcours de deux générations – les personnes nées en 1950, parties selon les anciennes règles et celles nées en 1954, concernées par la réforme. Résultat : la proportion d’actifs en emploi entre 60 et 62 ans a augmenté de 20 à 25 points pour les non-éligibles au dispositif « carrières longues », tandis que la probabilité d’être au chômage indemnisé a progressé de 12 à 15 points.
Cette hausse du maintien en emploi a donc partiellement compensé la montée du chômage chez les seniors. En 2016 déjà, l’Unédic observait une augmentation notable des allocataires âgés de 60 à 61 ans : +65 000 entre 2010 et 2022.
Changement de comportements avant l’âge légal
L’étude met en évidence un effet « préventif » : dès 57 ans, certains salariés ajustent leur stratégie professionnelle face au recul de la retraite. L’emploi progresse d’environ 5 points à cet âge, tandis que la probabilité de passer au chômage recule légèrement. Autrement dit, le report de l’âge de départ influence les comportements bien avant que la mesure ne s’applique réellement.
L’IPP relève aussi que les personnes éligibles au dispositif « carrières longues » ont connu des effets différents : leurs départs sont plus nombreux après l’assouplissement du dispositif en 2012 mais se produisent malgré tout plus tardivement qu’avant la réforme.
Impact budgétaire
Sur le plan financier, la réforme des retraites de 2010 a généré d’importants gains pour le système de retraite mais son impact sur l’Assurance chômage est resté quasi neutre.
Selon les estimations provisoires de l’IPP, le coût annuel pour l’Unédic n’excéderait pas 36 millions d’euros (somme marginale comparée aux 28,5 milliards d’euros de dépenses d’indemnisation enregistrées en 2010).
Cette neutralité s’explique par la compensation entre les hausses de cotisations liées à l’emploi prolongé et les dépenses supplémentaires d’allocations pour les seniors privés d’activité.
Fins de carrière
La question des fins de carrière reste stratégique pour le régime d’assurance chômage. Aujourd’hui, 18 % des allocataires indemnisés ont 55 ans ou plus, contre 40 % qui ont moins de 35 ans.
Si le taux de chômage des seniors demeure inférieur à celui des autres actifs (environ deux points de moins), leur retour à l’emploi reste plus difficile. Les chômeurs de plus de 55 ans sont presque deux fois plus nombreux à connaître des périodes longues sans emploi.
L’Unédic a également identifié un « âge pivot » autour de 56 ans, au-delà duquel la probabilité de retrouver un emploi durable chute nettement. Pour ces publics, plusieurs dispositifs spécifiques existent :
- Référence d’affiliation étendue à partir de 55 ans pour l’ouverture des droits,
- Durée maximale d’indemnisation allongée,
- Dispositif de maintien des droits jusqu’à la retraite à taux plein, qui concernait près de 30 % des allocataires de 62 ans et plus en 2022.
Réformes à venir
Si la réforme de 2010 est désormais ancienne, ses effets mesurés avec le recul du temps permettent de mieux anticiper les conséquences des ajustements futurs.