Des bonus prévus par lettre d’embauche doivent être pris en compte pour calculer l’indemnité de licenciement

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Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Un salarié est engagé par une banque à compter du 23 avril 2001 et exerce en dernier lieu les fonctions de responsable du « trading option de change » et du « Market Making Spot » chargé des opérations de couverture de change.

Sa rémunération est composée :

  • D’une partie fixe ;
  • Et d’une part variable comprenant notamment un « bonus » fixé, selon la lettre d'embauche, de façon discrétionnaire par la hiérarchie.

L’attribution de ce bonus étant subordonnée à une condition de présence dans l'entreprise à la date de paiement. 

Par courrier du 2 février 2009, l'employeur lui notifie un blâme.

Le salarié saisit alors la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de cette sanction.

Il est finalement licencié par lettre du 2 décembre 2009 et sollicite, devant la juridiction prud'homale la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes à titre d'indemnités de rupture, de rappel de salaires et de dommages et intérêts.

Plus précisément, le salarié conteste :

  • Le montant de l’indemnité compensatrice de préavis pour laquelle le bonus n’avait pas été pris en compte ;
  • Ainsi que le montant de l’indemnité de licenciement, qui elle également ne prenait pas en considération le montant de ce même bonus. 

Selon l’employeur ces bonus ne devaient pas être pris en compte, compte tenu du fait qu’ils constituaient des « gratifications discrétionnaires ». 

C’est cet argument que retient la Cour d’appel de Versailles, dans son arrêt du 2 octobre 2013, déboutant à cette occasion le salarié de sa demande.

Elle précise que les bonus doivent s’analyser comme des gratifications discrétionnaires ne pouvant s’intégrer au salaire de base pour le calcul de l’indemnité de licenciement ainsi que pour déterminer la valeur de l’indemnité compensatrice de préavis. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un complément d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité légale de licenciement et limiter à 200 000 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les bonus au titre des années 2008 et 2009 prévus par la lettre d'embauche et les courriers du 24 avril 2008, sont des gratifications discrétionnaires qui ne peuvent s'intégrer au salaire de base pour le calcul des indemnités dues au titre de la rupture ; 

La Cour de cassation ne partage pas le même avis.

Elle indique en effet que les bonus étaient :

  • Prévus par la lettre d’embauche et par courriers du 24 avril 2008 ;
  • Attribués périodiquement, constituant ainsi des éléments de la rémunération variable du salarié quand bien même leur montant étaient fixé de façon discrétionnaire par l’employeur. 

Ayant un véritable caractère de « salaire », ils devaient être :

  • Pris en compte pour le calcul de l’indemnité compensatrice de préavis ;
  • Pris également en considération pour la détermination de l’indemnité de licenciement. 

L’arrêt de la cour d’appel est cassé et annulé, les 2 parties renvoyées devant la Cour d’appel de Versailles autrement composée. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les bonus prévus par la lettre d'embauche et les lettres du 24 avril 2008, étaient en réalité attribués périodiquement et constituaient des éléments de la rémunération variable du salarié, quand bien même leur montant était fixé de manière discrétionnaire par l'employeur, ce dont elle aurait dû déduire qu'ayant le caractère de salaire ils devaient être pris en compte dans l'assiette de calcul des indemnités de rupture et de l'indemnité minimale due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande en paiement d'un complément d'indemnité compensatrice de préavis, congés compris, et d'indemnité légale de licenciement et en ce qu'il limite à 200 000 euros le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 2 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-26706 pourvoi n°13-27516

Nous profitons de la présente affaire, dans laquelle est évoqué le calcul de l’indemnité compensatrice de préavis, pour vous proposer le tableau synthétique qui suit et vous propose les différentes situations envisageables en cas de non-réalisation du préavis.

Préavis non effectué : les différentes situations  

Préavis non effectué

Motif

Conséquences

A la demande du salarié  

  • Pas d’indemnité compensatrice ;
  • Le salarié quitte l’entreprise à la notification ;
  • L’indemnité de licenciement prend en compte l’ancienneté acquise à la notification.

A la demande de l’employeur

  • Indemnité compensatrice de préavis à verser ;
  • L’indemnité de licenciement prend en compte l’ancienneté acquise à la fin du préavis.

Licenciement pour faute grave ou lourde 

  • Pas d’indemnité compensatrice ; 
  • Le salarié quitte l’entreprise à la notification. 

Inaptitude du salarié d’origine professionnelle 

  • Paiement d’une indemnité dont le montant est égal à l’indemnité compensatrice légale de préavis ; 
  • Le salarié quitte l’entreprise à la notification ; 
  • L’indemnité de licenciement prend en compte l’ancienneté acquise à la notification.

Inaptitude du salarié d’origine NON professionnelle

  • Pas d’indemnité compensatrice ; 
  • Le salarié quitte l’entreprise à la notification ;
  • L’indemnité de licenciement prend en compte l’ancienneté acquise au terme du préavis qui aurait été effectué.

Adhésion du salarié à la CSP 

  • Pas d’indemnité compensatrice si ancienneté >2 ans et préavis <2 mois ;
  • Indemnité compensatrice si ancienneté >2 ans et préavis >2 mois pour la partie excédant 2 mois ; 
  • Indemnité compensatrice si ancienneté<2 ans et préavis prévu.

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