La rupture d’un CDD pendant la période d’essai n’ouvre droit au paiement des salaires correspondant au contrat

Jurisprudence
Période d’essai

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Un salarié est engagé en qualité de coordinateur local chef de projet selon un contrat de travail CDD fixant la période d'embauche du 6 juillet 2009 au 30 juin 2010 et une période de congé sans solde du 13 juillet au 5 septembre 2009, ainsi qu'une période d'essai devant courir du 6 septembre au 6 octobre 2009.

Finalement, l’employeur rompt le contrat de travail le 17 septembre 2009, soit pendant la période d’essai.

Le salarie saisit la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaires, et de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail. 

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié et condamne l’employeur au versement de dommages et intérêts pour un 33.000 € au titre d’une rupture abusive de la période d’essai.

Pour rendre cet arrêt, les juges se référent à l’article L 1243-4 du code du travail, prévoyant le versement de dommages et intérêts pour rupture anticipée du contrat CDD non autorisée. 

La Cour de cassation n’est pas du même avis, casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, rappelant que la règle précité ne joue pendant la période d’essai. 

Extrait de l’arrêt : 

Attendu cependant que l'article L. 1242-11 du code du travail exclut l'application de l'article L. 1243-4 du même code pendant la période d'essai ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé que la rupture du contrat de travail à durée déterminée était intervenue pendant la période d'essai prévue au contrat, ce qui ne permettait pas au salarié d'obtenir le paiement, prévu par l'article L. 1243-4 du code du travail, de dommages-intérêts d'un montant égal aux salaires dûs jusqu'au terme du contrat, mais seulement celui de dommages-intérêts si la période d'essai avait fait l'objet d'une rupture abusive, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société A... à payer à M. X... la somme de 33 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de la période d'essai, l'arrêt rendu le 26 août 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°11-25604

Le contrat CDD peut être rompu dans 5 cas limitatifs, qui correspondent à des ruptures autorisées et qui n’entraînent aucune conséquence fâcheuse pour le salarié ou l’employeur.

En aucun cas, ne peuvent être évoqués les termes de « démission » ou « licenciement » pour un contrat CDD, ces « appellations » sont réservées au contrat de droit commun (le seul), à savoir le contrat CDI (Contrat à Durée Indéterminée). 

A la demande du salarié et pour un CDI 

Le salarié à qui un autre employeur propose la conclusion d’un contrat CDI, a toute faculté de rompre le contrat CDD

Le salarié doit alors respecter un délai qui est de:  

Si le CDD a été conclu avec un terme précis :

  • 1 jour par semaine (le calcul se fait sur la durée du contrat) avec un maximum de 2 semaines de délai. 

Exemple 1 :

  • Le salarié C vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ;
  • Il est actuellement en contrat CDD de 8 semaines ;
  • Il travaille 5 jours par semaine, du lundi au vendredi inclus.
  • Le délai à observer au maximum sera de 8 jours, il est inférieur à la durée maximum de 10 jours. 

Exemple 2 :  

  • Le salarié D vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ;
  • Il est actuellement en contrat CDD de 12 semaines ;
  • Il travaille 5 jours par semaine, du lundi au vendredi inclus.
  • Le délai à observer au maximum sera de 10 jours, car le calcul initial indiquait 12 jours mais un plafonnement à 2 semaines est à respecter. 

Si le CDD a été conclu sans terme précis (cas d’un CDD de remplacement par exemple)  

  • 1j/semaine (calcul sur le travail effectué) avec un maximum de 2 semaines de délai.

Exemple :  

  • Le salarié D vient de trouver un contrat CDI en cours de contrat CDD ; 
  • Il est actuellement en contrat CDD de 8 semaines ; 
  • Il a réalisé déjà 3 semaines de contrat. 
  • Le délai à observer au maximum sera de 3 jours, il est inférieur à la durée maximum de 10 jours. 

Bien entendu rien n’interdit à l’employeur d’octroyer un délai moindre avec l’accord du salarié. 

Article L1243-2 

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 1243-1, le contrat de travail à durée déterminée peut être rompu avant l'échéance du terme à l'initiative du salarié, lorsque celui-ci justifie de la conclusion d'un contrat à durée indéterminée.  

Sauf accord des parties, le salarié est alors tenu de respecter un préavis dont la durée est calculée à raison d'un jour par semaine compte tenu :  

1° De la durée totale du contrat, renouvellement inclus, lorsque celui-ci comporte un terme précis ;  

2° De la durée effectuée lorsque le contrat ne comporte pas un terme précis.  

Le préavis ne peut excéder deux semaines.  

Accord des deux parties (employeur et salarié) 

Article L1243-1

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure.

Faute grave (ou lourde) du salarié 

La rupture anticipée est possible en cas de faute grave ou lourde du salarié. 

Le code du travail n’évoque que la faute grave, mais la faute lourde plus "conséquente" que la faute grave est sous entendue. 

Article L1243-1 

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure.

Force majeure

La rupture anticipée est admissible en cas de force majeure (incendie usine,..) évènement imprévisible, insurmontable et étranger à l'entreprise qui l'invoque.  

Toutefois l’article L 1243-4 du code du travail indique que le salarié aura droit à une indemnité compensatrice équivalant aux rémunérations qu’il aurait perçu jusqu’au terme du contrat en cas de sinistre. 

Il faut bien comprendre le sens retenu pour « force majeure ». 

C’est une situation à la fois imprévisible, non invocable à l’entreprise et qui n’aura pas tendance à se renouveler. 

En d’autres termes, et pour mieux retenir cette notion : 

  • « Je ne l’avais pas prévu, ce n’est pas de ma faute, cela ne se reproduira plus »

Article L1243-1 

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure.

Article L1243-4 

La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8.  

Toutefois, lorsque le contrat de travail est rompu avant l'échéance du terme en raison d'un sinistre relevant d'un cas de force majeure, le salarié a également droit à une indemnité compensatrice dont le montant est égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat. Cette indemnité est à la charge de l'employeur.

En cas d’inaptitude du salarié

Depuis la loi du 17 mai 2011, le contrat CDD peut désormais être rompu de façon anticipée. 

En cas d’inaptitude constatée d’un salarié en contrat CDD, la rupture du contrat peut être désormais prononcée. 

Ce nouveau cas de rupture anticipé s’ajoute au cas de force majeure. 

La résolution judiciaire du contrat à la demande de l’employeur n’est plus possible. 

Si l’inaptitude est d’origine professionnelle 

Le régime qui s’applique est analogue à celui d’un salarié en contrat CDI

L’employeur devra donc : 

  • Rechercher les possibilités de reclassement ; 
  • Si la rupture n’est pas prononcée dans le délai d’un mois suivant la reconnaissance d’inaptitude prononcée par le médecin du travail, le salaire doit percevoir à nouveau sa rémunération ; 
  • L’employeur doit verser lors de la rupture une indemnité qui ne peut être inférieure au double de l’indemnité de licenciement et qui se cumule avec l’indemnité de précarité (à la différence des autres cas de ruptures anticipées).

Si l’inaptitude n’est pas d’origine professionnelle 

Le régime qui s’applique alors est : 

  • Versement d’une indemnité de rupture qui ne peut être inférieure à l’indemnité de licenciement et qui se cumule avec l’indemnité de précarité. 

La procédure concernant les propositions de reclassement ne s’appliquent pas selon les termes du Code du travail MAIS une réponse ministérielle du 1/11/2011 indique que le reclassement doit être respecté même si l’inaptitude n’est pas d’origine professionnelle. 

Article L1243-1 

Modifié par LOI n°2011-525 du 17 mai 2011 - art. 49 

Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail.

Conséquences de la rupture de la période d’essai 

Dans son présent arrêt, la Cour de cassation rappelle les dispositions du code du travail concernant la rupture de la période d’essai. 

Le code du travail prévoit que lorsque le contrat CDD est rompu pendant la période d’essai : 

  • Alors les dispositions de l’article L 1242-9 ne sont pas applicables (possibilité pour le contrat de remplacement de débuter avant l’absence de la personne à remplacer) ; 
  • Les dispositions concernant la rupture anticipée autorisée du contrat ne s'appliquent pas ; 
  • Le report possible du terme d’un contrat conclu pour remplacement d’un salarié absent n'est pas admis ; 
  • Le versement de l’indemnité de précarité n’est pas envisageable. 

Article L1242-11 

Ne sont pas applicables pendant la période d'essai les dispositions relatives : 

1° A la prise d'effet du contrat prévue à l'article L. 1242-9 ; 

2° A la rupture anticipée du contrat prévue aux articles L. 1243-1 à L. 1243-4 ; 

3° Au report du terme du contrat prévue à l'article L. 1243-7 ; 

4° A l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8.

Article L1242-9 

Lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour remplacer un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu ou pour un remplacement effectué au titre des 4° et 5° de l'article L. 1242-2, il peut prendre effet avant l'absence de la personne à remplacer.  

Article L1243-7

Lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour remplacer un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu ou pour un remplacement effectué au titre des 4° et 5° de l'article L. 1242-2, le terme du contrat initialement fixé peut être reporté jusqu'au surlendemain du jour où la personne remplacée reprend son emploi.

Article L1243-8 

Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. 

Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié. 

Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant.

Ne pas oublier la possible « rupture abusive » de la période d’essai 

L’article L 1221-20 du code du travail indique que la période d’essai a pour objectif de tester : 

  • Si le travail proposé correspond aux attentes du salarié ; 
  • Si les compétences du salarié correspondent aux attentes de l’employeur. 

Tout autre motif de rupture conduirait alors à prononcer une rupture abusive, un arrêt de la Cour de cassation récent le confirme. 

 (Pourvoi 09-42.773 15/12/2010)

L’affaire présente faisant l’objet d’un renvoi vers une nouvelle cour d’appel, ce sera à elle de décider si la rupture est abusive ou pas… 

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