La prise d’acte justifiée ouvre droit à dommages et intérêts pour défaut information portabilité prévoyance

Jurisprudence
Prise acte rupture contrat travail

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Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

L’affaire présente concerne une salariée dont la prise d’acte est reconnue fondée sur des griefs fondés.

Cette salariée considère en outre, qu’elle ouvre droit au paiement de dommages et intérêts au titre du défaut d’information concernant la portabilité de la prévoyance et saisit la juridiction prud’homale sur ce point, parmi d’autres. 

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Douai dans son arrêt du 28 mars 2014, donne raison à la salariée. 

La Cour de cassation approuve cet arrêt, relevant en l’espèce que la salariée ouvre droit au paiement de dommages et intérêts au titre du défaut d’information concernant la portabilité de la prévoyance dont elle est victime.

Extrait de l’arrêt :

Attendu qu'ayant relevé que la salariée avait manifesté de manière expresse sa volonté de ne pas reprendre son poste et de mettre fin au contrat de travail, la cour d'appel, qui a constaté que les lettres de l'employeur du 1er mars 2011 lui demandant de préciser son intention de démissionner, puis du 8 avril 2011 la mettant en demeure de justifier de son absence irrégulière étaient restées sans réponse, a pu décider que l'abstention volontaire de la salariée de justifier de son absence rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ; 
PAR CES MOTIFS : 
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°14-18334

Rappelons quels sont les nombreux effets d’une prise d’acte de rupture du contrat de travail prononcée aux torts de l’employeur, en d’autres termes lorsque la prise d’acte repose sur des griefs fondés. 

Effet numéro 1 : la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Lorsque la prise d’acte repose sur des griefs fondés, elle produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les indemnités suivantes sont alors à verser : 

Indemnité de licenciement 

Lorsque la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié doit alors obtenir le paiement de l’indemnité de licenciement. 

Nota : l’ancienneté prise en compte est celle constatée à la prise d’acte. 

Cour de cassation du 28/09/2011 Pourvoi n° 09-67510

Indemnité compensatrice de préavis  

La prise d’acte a pour effet de rompre le contrat de travail immédiatement, privant ainsi le salarié du bénéfice d’une période de préavis.

L’employeur se trouve donc dans l’obligation de verser une indemnité compensatrice correspondant au préavis dont aurait bénéficié le salarié en cas de licenciement. 

Indemnité compensatrice de congés payés au titre du préavis non effectué  

Conséquence directe, l’entreprise se trouve également redevable d’une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à la période de préavis non effectuée, généralement cette indemnité est chiffrée selon la méthode du « 1/10ème ».

Exemple :

  • Indemnité compensatrice de préavis équivaut à 3.000 € ;
  • L’indemnité compensatrice de congés payés sera évaluée à 300€ (3.000 €* 1/10ème). 

Cour de cassation du 20/01/2010 pourvoi 08-43471

Nota : l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents sont dus, y compris lorsque le salarié a été malade pendant cette période. 

Cour de cassation du 20/01/2010 pourvoi 08-43476

Effet numéro 2 : versement de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les valeurs varient selon la taille et l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

On distingue ainsi 2 situations :

  • Le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté et/ou se situe dans une entreprise de moins de 11 salariés ;
  • Le salarié justifie d’une ancienneté d’au moins 2 ans et l’entreprise compte 11 salariés et plus. 

Précision concernant l’effectif de l’entreprise 

Concernant l’effectif de l’entreprise, c’est bien l’effectif « habituel » qu’il faut retenir et non celui en vigueur au moment où se produit la prise d’acte. 

Cour de cassation du 27/05/1992, pourvoi 89-42593 

Le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté et/ou se situe dans une entreprise de moins de 11 salariés 

Dans ce cas, le salarié peut obtenir le paiement d’une indemnité dont le montant est fixé souverainement par le juge.

Il n’existe pas de valeur minimale ou maximale.

En tout état de cause, le salarié ne peut prétendre au paiement d’une indemnité, dont la valeur minimale correspondrait à 6 mois de salaires. 

Cour de cassation du 26/09/2006, pourvoi 05-43841

Le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté et l’entreprise compte 11 salariés et plus 

Difficile d’envisager une réintégration, puisque le contrat a été rompu par le salarié, ce dernier peut alors prétendre au paiement d’une indemnité dont la valeur minimale est fixée 6 mois de salaires (plus précisément, salaires bruts des 6 derniers mois).

Article L1235-3

Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse,(…)

le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

A ce sujet, la Cour de cassation précise que le salaire de référence doit comprendre :

  • Le salaire de base ;
  • Les primes et avantages en nature versés au salarié pendant cette période. 

Cour de cassation du 3/12/1992, pourvoi 90-43818

Concernant le régime fiscal et social de l’indemnité versée, les entreprises doivent respecter les règles suivantes :

  • Indemnité totalement exonérée d’impôt sur le revenu ; 

Article 80 duodecies

Modifié par LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 - art. 21

1. Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes.

Ne constituent pas une rémunération imposable :

1° Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-1, L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-11 à L. 1235-13 du code du travail ;

  • Indemnité exonérée de cotisations sociales dans la limite de 2 fois le PASS (il convient de prendre en compte la totalité des sommes versées, à savoir l’indemnité de licenciement+ l’indemnité versée dans le cadre du licenciement prononcée sans cause réelle et sérieuse et absence de réintégration du salarié) ;
  • Cotisations CSG et CRDS : assujettissement au-delà des montants légaux ou conventionnels. A ce sujet, l’administration dans une circulaire du 14/04/2011 précise qu’il convient de confronter le cumul du montant minimal de l’indemnité de rupture avec le montant minimal légal des dommages et intérêts avec les sommes réellement perçues par le salarié. Précision importante, la fraction soumise aux cotisations CSG/CRDS ne peut en aucun cas être inférieure au montant assujetti aux cotisations de sécurité sociale.

Extrait de la circulaire du 14/04/2011

la fraction soumise à la CSG et à la CRDS ne peut être inférieure au montant assujetti aux cotisations de sécurité sociale.(…)

Pour apprécier la limite d’exclusion d’assiette, il doit être fait masse de l’ensemble des indemnités versées au salarié dans le cadre des dispositions de l’article 80 duodecies du code général des impôts y compris les indemnités transactionnelles.

CIRCULAIRE INTERMINISTÉRIELLE N° DSS/SD5B/2011/145 du 14 avril 2011 relative aux modalités d'assujettissement aux cotisations et contributions de sécurité sociale des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts.

Effet numéro 3 : remboursement allocations chômage 

Le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté et/ou se situe dans une entreprise de moins de 11 salariés 

Alors que cela peut être envisageable pour un salarié justifiant de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise qui compte 11 salariés et plus, le remboursement des allocations chômage n’est pas envisageable dans le cas présent. 

Cour de cassation du 27/05/2009 pourvoi 07-45582 

Le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté et l’entreprise compte 11 salariés et plus 

Circonstance aggravante, l’employeur peut être condamné à rembourser tout ou partie des allocations chômage versées au salarié depuis le licenciement jusqu’au jugement, dans la limite de 6 mois. 

Article L1235-4

Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Effet numéro 4 : versement de dommages et intérêts au titre de la portabilité de la prévoyance

C’est l’objet de la présente affaire, selon le présent arrêt de la Cour de cassation, lorsque la prise d’acte repose sur des griefs fondés, le salarié ouvre droit alors au paiement de dommages et intérêts réparant la perte de chance de bénéficier des informations relatives à la portabilité de la prévoyance.

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