Une période d’essai de 9 mois, pour un directeur général adjoint, est raisonnable

Jurisprudence
Période d’essai

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Un salarié est engagé le 1er  février 2001, en qualité de directeur général adjoint, avec une période d'essai de 3 mois et un stage de 6 mois, pendant lesquels les parties disposaient de la faculté de se délier sans préavis pendant le premier mois et moyennant un préavis d'un mois au-delà.

Nommé le 29 juin 2001, directeur général, par délibération du conseil d'administration de la société, M. X... est révoqué de son mandat le 11 mars 2009.

Par lettre du 13 mars 2001, la société met fin au contrat de travail en invoquant la rupture de la période « probatoire ».

Le salarié saisit la juridiction prud'homale pour voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de la rupture.

Il estime en effet qu’une période d’essai de 9 mois est totalement déraisonnable.

La cour d’appel puis la Cour de cassation déboutent le salarié de sa demande, estimant qu’une période d’essai de 9 mois (prévue de façon conventionnelle) n’est pas déraisonnable.

Les juges précisent en outre, que la désignation du salarié comme mandataire social, avec suspension du contrat de travail pendant la durée de ce mandat, ne mettant pas fin à la période d'essai en cours. 

En d’autres termes, la période d’essai avait donc repris son cours après la révocation du mandat social.

La rupture du contrat de travail entrait donc dans le cadre d’une rupture de la période d’essai, et non un licenciement comme le demandait le salarié en l’espèce. 

Extrait de l’arrêt : 

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a exactement retenu que la durée de neuf mois de la période d'essai prévue par la convention collective pour le personnel d'encadrement était raisonnable ;

Attendu, ensuite, que la désignation du salarié comme mandataire social, avec suspension du contrat de travail pendant la durée de ce mandat, en l'absence de fonctions techniques distinctes, ne mettant pas fin à la période d'essai en cours, la cour d'appel en a déduit à bon droit que celle-ci avait repris son cours après la révocation du mandat social ;

Cour de cassation du , pourvoi n°12-11825

Profitons de la présente affaire, pour rappeler quelques notions importantes concernant la période d’essai, désormais légalement encadrée depuis la loi de 2008. 

La loi LMMT (Loi de Modernisation du Marché du Travail) du 25/06/2008 (Jo du 26/06/2008)  a modifié les conditions de la période d’essai.

Il existe désormais une période d’essai « légale ». 

Utilité de la période d’essai :  

Comme l’indique le code du travail (article L 1221-20), la période d’essai a une double fonction :

  • Pour l’employeur, c’est une période pendant laquelle il va tester les performances de son salarié ;
  • Pour le salarié, c’est une période pendant laquelle il va tester son poste de travail, l’entreprise et les conditions de travail.

Article L1221-20

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)

La période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent.

Durée de la période d’essai avant la loi 

La durée des périodes d’essai était fixée selon les conventions collectives, les accords collectifs, les accords d’entreprise et parfois selon les usages de la société.

La durée de la période d’essai pouvait donc varier d’une entreprise à une autre. 

Durée de la période d’essai depuis la loi 

La loi LMMT du 25 juin 2008 fixe une période d’essai légale.

Elle concerne donc tous les salariés depuis le 27 juin 2008.

Elle dépend du statut du salarié et peut être renouvelée une fois seulement.

Les durées maximales sont : 

Catégories personnel 

Durée initiale maximum

Ouvrier et employé

2 mois

TAM

3 mois

Cadres

4 mois

TAM= Techniciens Agents de Maîtrise 

Article L1221-19 

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)

Le contrat de travail à durée indéterminée peut comporter une période d'essai dont la durée maximale est :

1° Pour les ouvriers et les employés, de deux mois ;

2° Pour les agents de maîtrise et les techniciens, de trois mois ;

3° Pour les cadres, de quatre mois. 

La période d’essai ne se présume pas, de ce fait l’employeur doit obligatoirement la faire figurer sur le contrat de travail.

Autrement, le salarié pourra considérer qu’il n’a pas de période d’essai, et que toute rupture par l’employeur s’analysera en un licenciement avec toutes ses conséquences. 

Périodes d’essai prévues par des accords collectifs avant la loi

Nota :

C’est le cas dans la présente affaire, la période d’essai de 9 mois était en vigueur avant l’instauration d’une période d’essai légale.

Lors de la promulgation de la loi LMMT, le législateur a prévu les cas particuliers d’entreprises déjà soumises à des périodes d’essais réglementées.

L’article L 1221-22 du Code du travail donne les cas d’exception permettant de fixer des périodes d’essai différentes des périodes d’essai légales. 

Situation

Conclusion

L’accord collectif prévoit une période d’essai plus courte.

L’accord a été signé APRÈS LMMT : l’accord s’applique.

L’accord de branche prévoit une période d’essai plus longue

Cet accord s’applique s’il a été réalisé AVANT LMMT

Période d’essai du contrat travail >durée légale

Seule la période légale est applicable

Période d’essai du contrat travail <durée légale

La période contractuelle s’applique.

L’accord de branche n’autorise pas le renouvellement d’une période d’essai

Le renouvellement est impossible, la LMMT soumet cette possibilité à l’existence d’un accord collectif de branche étendu.

Article L1221-22 

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V) 

Les durées des périodes d'essai fixées par les articles L. 1221-19 et L. 1221-21 ont un caractère impératif, à l'exception : 

- de durées plus longues fixées par les accords de branche conclus avant la date de publication de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail ; 

- de durées plus courtes fixées par des accords collectifs conclus après la date de publication de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 précitée ; 

- de durées plus courtes fixées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail.

Le décompte de la période d’essai 

Le décompte doit se faire en : 

  • Jours calendaires si la période d’essai est exprimée en jours ; 
  • En semaines civiles si la période d’essai est exprimée en semaines ; 
  • En mois civils si la période d’essai est exprimée en mois. 

Un arrêt récent de la Cour de cassation (arrêt 28/04/2011, pourvois 09-40464 et 09-72165) précise que cette méthode calendaire s’applique automatiquement sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires. 

« Sauf disposition conventionnelle ou contractuelle contraire, toute période d’essai, qu’elle soit exprimée en jours, en semaines ou en mois, se décompte de manière calendaire. »

 Le point de départ de la période d’essai est fixé au premier jour de la prise de fonction par le salarié. 

Exemples :  

  • Période d’essai de 2 mois qui débute le 15/06/2009 se termine le 14/08/2009 à minuit; 
  • Période d’essai de 45 jours qui débute le 01/07/2009 se termine le 15/08/2009 à minuit. 

Lorsqu’une période expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié, elle n’est pas prolongée jusqu’au premier jour ouvrable suivant !!

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