Que deviennent les avantages perdus pour un salarié protégé dont le licenciement est nul ?

Jurisprudence

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Une salariée est engagée le 22 février 1988 par une compagnie aérienne, en qualité d'agent des services commerciaux.

Elle occupe l'emploi d'assistant du chef de service trafic-piste et de chef d'escale de permanence à Cayenne à compter du 1er décembre 1999.

Suite au retrait de ses fonctions, elle saisit la juridiction prud'homale.

La salarié, alors représentant syndical au comité d'établissement, est licenciée le 16 juillet 2002 après autorisation de l'inspecteur du travail.

Cette autorisation ayant été annulée, l'intéressée est réintégrée à compter du 7 février 2003.

Elle est de nouveau licenciée le 19 mai 2004 avec autorisation de l'inspecteur du travail.

Le Conseil d'État ayant annulé cette autorisation par arrêt du 2 mars 2011, la salariée est réintégrée à compter du 13 avril 2011 en qualité d'agent de maîtrise encadrement exploitation 2.

Elle est finalement licenciée pour faute grave le 16 juillet 2012. 

La question qui se pose dans l’affaire présente concerne la valeur de l’indemnité due à la salariée pendant sa période d’éviction de l’entreprise.

Suite à l’annulation des licenciements, elle est en droit de prétendre aux salaires qu’elle aurait perçus si elle avait été présente, la salariée prétend de son côté qu’à ses rémunérations doivent s’ajouter les avantages dont bénéficient les salariés, à savoir des billets d’avion qu’elle avait acquis à « prix non réduit » … 

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Fort-de-France dans son arrêt du 18 juin 2015 déboute la salariée de sa demande.

Elle estime en effet que le bénéfice de billets à tarifs réduits est lié à la réalisation d’un travail, ce qui n’était pas le cas en l’occurrence. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande au titre des frais de déplacement exposés entre le 16 août 2004 et le 13 avril 2011, l'arrêt retient que le bénéfice des billets à tarifs soumis à conditions n'étant pas la contrepartie d'une prestation de travail, la salariée ne saurait obtenir le remboursement des billets d'avion qu'elle a payés pendant la période d'éviction ;

Mais cet arrêt est cassé et annulé par la Cour de cassation.

Elle rappelle que lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration.

Elle devait donc à ce titre bénéficier des avantages dont elle avait été privée, en l’espèce des billets d’avion à tarif réduit. 

Les 2 parties sont renvoyées devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée.

Extrait de l’arrêt :

Attendu, cependant, que lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée avait été privée, entre son licenciement et sa réintégration, d'un avantage lié à son emploi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; (…)

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de ses demandes au titre des frais de déplacement exposés entre le 16 août 2004 et le 13 avril 2011et de ses demandes relatives à la nullité du licenciement du 17 février 2012, l'arrêt rendu le 18 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Cour de cassation du

Profitons de la présente affaire pour rappeler quelques cas qui peuvent conduire à prononcer la nullité d’un licenciement… 

Les cas de nullité

  • Licenciement pour victimes de harcèlement, de discrimination ou personnes ayant relaté ou témoigné de tels agissements (articles L 1132-1 à L 1132-4, L 1152-2 et L 1152-3, L 1153-2 à L 1153-4 du Code du travail) ;
  • Violation du principe d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L 1144-3 du Code du travail) ;
  • Licenciement prononcé en méconnaissance du droit de grève (articles L 1132-2 et L 1132-4 du Code du travail) ;
  • Licenciement prononcé pendant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie professionnelle (sauf faute grave sans rapport avec l’arrêt de travail) (articles L 1226-13, L 1226-9 et L 1226-18 du Code du travail) ;
  • Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des représentants du personnel, représentants syndicaux (articles L 1132-1 à L 1132-4 du Code du travail) ;
  • Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des femmes enceintes (articles L 1225-4 et L 1225-5 du Code du travail) ;
  • Licenciement prononcé pour des opinions religieuses, syndicales, situation de famille (articles L 1132-1 à L 1132-4, du Code du travail). 

Rappelons que la prise d’acte de rupture du contrat de travail par un salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul.

Signalons également que la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur, notamment pour des faits de harcèlement moral produit alors les effets d’un licenciement nul.

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'après avoir estimé que la salariée était fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, en raison notamment du harcèlement moral dont elle avait été victime sur son lieu de travail, la cour d'appel a énoncé à bon droit que cette rupture produisait les effets d'un licenciement nul conformément aux dispositions de l'article L. 1152-3 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du 20/02/2013 pourvoi 11-26560

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