La protection liée aux accidents de travail ne s’applique pas aux accidents de trajet

Jurisprudence
Inaptitude

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Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

La présente affaire concerne une salariée engagée le 19 novembre 1992 en qualité d'hôtesse de caisse.

Le 6 janvier 2017, la salariée est déclarée inapte à son poste par le médecin du travail, puis licenciée le 20 mars suivant pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Précision importante, l’inaptitude est prononcée suite à un accident de trajet.

La salariée saisit la juridiction prud’homale, considérant que l’employeur avait manqué à son obligation légale de consultation des déléguées du personnel vis-à-vis de la procédure de reclassement. 

Dans un premier temps, la Cour d'appel de Versailles, dans son arrêt du 5 juin 2014, déboute la salariée de sa demande.

Elle considère en effet que la période de protection dont bénéficient les salariés victime d’un accident du travail et déclarés inapte à la suite, ne s’applique pas à l’inaptitude consécutive à un accident de trajet. 

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, l’employeur n’ayant pas en l’occurrence l’obligation de consulter les délégués du personnel sur le reclassement de la salarié après reconnaissance de son inaptitude par la médecine du travail. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'il n'était pas discuté que l'accident du 31 mai 2006 était un accident de trajet, la cour d'appel a, sans être tenue de répondre à des arguments que ses constatations, excluant un aveu ou une renonciation, rendaient inopérants, exactement retenu que la salariée ne pouvait bénéficier de la protection spéciale accordée aux salariés victimes d'un accident du travail prévue par les articles L. 1226-10 et suivants du code du travail, ce qui excluait nécessairement l'obligation pour l'employeur de consulter les délégués du personnel ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°14-28869

La présente affaire est très intéressante, car elle nous permet de rappeler le nouveau régime désormais en vigueur depuis la loi travail.

Le régime en vigueur avant la loi travail

Obligation de reclassement 

C’est à partir de la 2ème visite médicale (délai de 2 semaines entre chaque visite) auprès de la médecine du travail que l’obligation de reclassement pèse sur l’employeur.

Dans le cas où le maintien du salarié entraîne un danger immédiat, l’inaptitude est prononcée au terme d’une seule visite médicale.

Article R4624-31

Modifié par Décret n°2012-135 du 30 janvier 2012 - art. 1

Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé :

1° Une étude de ce poste ;

2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ;

3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires.

Lorsque le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de préreprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus, l'avis d'inaptitude médicale peut être délivré en un seul examen.

Si l’employeur a anticipé les recherches de reclassement, par exemple en commençant au terme de la 1ère visite médicale, ces recherches doivent néanmoins être poursuivies après la 2ème visite médicale auprès de la médecine du travail.

Ne sera par exemple pas prise en compte, l’offre de reclassement intervenue antérieurement à la seconde visite médicale. 

Cour de cassation du 28/10/2009 pourvoi 08-42804

Consultation des délégués du personnel et cas particulier des entreprises d’au moins 50 salariés 

Selon l’article L 1226-10 du code du travail et uniquement en cas d’inaptitude d’origine professionnelle, l’employeur a l’obligation de soumettre les propositions de reclassement à l’avis préalable des DP (Délégués du Personnel).

D’autre part, dans les entreprises comptant un effectif d’au moins 50 salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. 

Article L1226-10

Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 43

Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

Le nouveau régime selon la loi travail 

Obligation de reclassement 

Ce sont les articles suivants du code du travail qui nous donnent les informations concernant l’obligation de reclassement par l’employeur en cas d’inaptitude :

  1. Article L 1226-2-1 (nouvel article inséré dans le code du travail) ;
  2. Article L 1226-12 ;
  3. Article L 1226-20. 

Sont ainsi confirmés les points suivants :

  1. L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail ;
  2. Lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement (l’article L 1226-12 évoque ce point pour une inaptitude d’origine professionnelle, et l’article L 1226-2-1 au titre d’une inaptitude d’origine non professionnelle). 

Concernant la rupture du contrat de travail, celle-ci ne sera possible que si l’employeur justifie :

  1. De son impossibilité de proposer un emploi ;
  2. Du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions.

Dispense de reclassement 

La loi travail apporte une modification importante à ce sujet. 

Désormais, l’employeur est dispensé de son obligation de proposer un reclassement, sous réserve de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail :

  1. Que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ;
  2. Ou que l'état de santé du salarié ferait obstacle à tout reclassement dans un emploi.  

Désormais, dans l’esprit d’harmoniser les règles de reclassement comme nous vous l’indiquions en présentation de la présente actualité, cette possibilité est ouverte :

  • En cas d’inaptitude d’origine professionnelle (consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle) ;
  • Mais également en cas d’inaptitude d’origine non professionnelle.



Consultation des délégués du personnel et cas particulier des entreprises d’au moins 50 salariés 

Désormais, ce sont les articles L 1226-10 et L 1226-2 du code du travail qui traitent de l’obligation de soumettre les propositions de reclassement à l’avis préalable des DP.

L’article L 1226-10 évoque toujours une inaptitude d’origine professionnelle (le seuil de 50 salariés n’est désormais plus mentionné concernant les formulations du médecin du travail formule des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté) ;

L’article L 1226-2 évoque de la même façon, l’inaptitude d’origine non professionnelle.

Article L1226-10

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 102 (V)

Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Article L1226-2

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 102 (V)

Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

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