Licenciement, dispense de préavis et clause de non-concurrence : attention aux erreurs de procédures !

Jurisprudence
Clause non concurrence

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La présente affaire concerne une salariée engagée le 16 juin 2008 en qualité de comptable.

Son contrat de travail contient une clause de non-concurrence prévoyant le versement d’une contrepartie financière, sur une durée limitée à 12 mois, de :

  • 200 % de la rémunération mensuelle perçue en moyenne au cours des 24 derniers mois en cas de licenciement ;
  • Et de 50 % de cette rémunération mensuelle en cas de démission. 

Extrait de l’arrêt :

l'article 17 du contrat initial prévoyait une clause de non-concurrence limitée à une période de douze mois en contrepartie de laquelle le salarié devait percevoir après son départ effectif de la société, une indemnité spéciale fixée d'un commun accord entre les parties à 200 % de la rémunération mensuelle perçue en moyenne au cours des 24 derniers mois en cas de licenciement, et à 50 % de cette rémunération mensuelle en cas de démission. 

Le contrat de travail précise en outre, que la levée de cette clause de non-concurrence doit être réalisée :

  • Dans les 3 semaines suivant la notification du licenciement en cas d’exécution du préavis ;
  • Ou dans les 2 semaines suivant la rupture en cas de dispense d'exécution de préavis. 

La salariée est licenciée le 7 octobre 2010, son employeur la dispensant à cette occasion de préavis (d’une durée de 2 mois)

Le 24 novembre 2010, l’entreprise informe la salariée qu’elle est dispensée de l’exécution de la clause de non-concurrence, la privant ainsi du versement de la contrepartie financière.

Mais la salariée saisit la juridiction prud’homale, estimant que la levée de la clause de non-concurrence était intervenue beaucoup trop tardivement, et qu’elle ouvrait droit de ce fait au paiement de la contrepartie financière. 

Ce point est contesté par l’employeur, estimant que la rupture de son contrat de travail doit s’entendre au 7 décembre 2010, terme du préavis, l’entreprise ayant informé la salariée le 24 novembre, elle ne se trouvait pas « hors délai » pour effectuer la levée de la clause de non-concurrence.

Extrait de l’arrêt :

Le contrat réservait à la société le droit de dispenser le salarié de l'exécution de la clause de non-concurrence ou d'en réduire la durée (…)

Le contrat que vous avez signé avec l'entreprise le 5 juin 2008 et confirmé par l'avenant du 16 mars 2009 comportait une clause de non-concurrence sur l'article 17. Comme votre contrat de travail nous y autorise, nous entendons expressément vous dispenser de l'application de cette clause il vous est donc permis de travailler pour toute entreprise de votre choix ou d'exercer toute activité de votre choix. Vous êtes donc, dès la fin de votre préavis, déliée de toute obligation à notre endroit, tout en demeurant tenu de respecter une obligation de discrétion à l'égard des éléments confidentiels que vous auriez pu avoir connaissance à l'occasion de votre travail. Bien entendu dans ces conditions, l'indemnité compensatrice de non-concurrence ne vous est pas due »(…)

Mme X...fait valoir que la renonciation de l'employeur a été tardive au regard des dispositions contractuelles exigeant d'en fait usage dans les trois semaines suivant la notification de son licenciement en cas de préavis ou dans les deux semaines suivant la rupture en cas de dispense d'exécution de préavis ; que la rupture de son contrat de travail doit être fixée au jour de son départ effectif de l'entreprise, soit à compter du 7 octobre 2010 compte tenu de la non-exécution de son préavis dont elle a bénéficié du fait de l'employeur. L'employeur conteste la date à laquelle le contrat de travail a pris effectivement fin, soutenant qu'il convient de retenir soit le 23 septembre 2010, date de sa mise à pied, soit le 7 décembre 2010, terme de son préavis de deux mois même si la notification de son licenciement est intervenue le 7 octobre 2010 et que l'intéressée a été dispensée d'exécuter son préavis. Elle en déduit qu'elle a levé l'obligation de non concurrence dans les délais posés par le contrat.

La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 18 février 2015, donne raison à la salariée.

Elle estime en effet que la levée de la clause de non-concurrence était intervenue beaucoup trop tardivement. 

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, précisant que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis, doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, c'est-à-dire à la notification du licenciement.

Faute d’avoir levé, dans les délais, la clause de non-concurrence, l’entreprise est condamnée dans l’affaire présente à verser à la salariée la contrepartie financière au titre de cette clause. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que l'employeur qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ; que l'arrêt retient que l'employeur a licencié la salariée le 7 octobre 2010 en lui demandant de ne pas effectuer son préavis et que la levée de la clause de non-concurrence n'est intervenue que le 24 novembre 2011 ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision se trouve légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°15-17666

Comme nous venons de le constater au travers de la présente affaire, les entreprises doivent agir avec prudence lorsqu’elles souhaitent dispenser le salarié de sa clause de non-concurrence.

L’affaire présente nous rappelle un précédent arrêt rendu par la Cour de cassation et que nous vous rappelons ci-après. 

Début de l’application de la clause de non-concurrence en cas de dispense de préavis

L’affaire jugée le 22 juin 2011 par la Cour de cassation est assez complexe et donne un éclairage intéressant sur la date d’application de la clause de non-concurrence.

Elle concerne 2 salariés employés en qualité de consultants ingénieur-conseil par lune société.

Ils en deviennent par la suite associés.

La société est reprise par la suite par une autre entreprise, les contrats de travail des deux salariés, qui par ailleurs avaient cédé leurs parts sociales à la société acheteuse, sont transférés.

Les intéressés ont signé le 19 septembre 2002, à effet du 1er  octobre 2002, un contrat de travail qui prévoyait une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable annuelle en fonction d'objectifs définis, l'employeur s'engageant à ne licencier aucun des deux salariés pour motif économique dans les deux années suivant la date d'engagement, et, en cas de licenciement pendant cette période, à leur verser, sauf dans l'hypothèse d'un licenciement pour faute lourde ou grave ou d'une cause définie à l'article 16 du contrat de travail, une indemnité contractuelle de rupture.

Le même contrat stipulait, dans son annexe A, une clause de non-concurrence d'une durée de 12 mois ainsi libellée : 

 "(...) l'employeur (...) vous paiera à partir de la cessation effective du contrat de travail et tant que cet engagement restera en vigueur, 25 % de la rémunération en espèces qui vous aura été versée par l'employeur durant les 12 mois civils précédant la cessation de votre emploi (...). Cette indemnité vous sera versée en mensualités de montant égal, le premier versement étant effectué à la première date de paiement des salaires suivant la date effective de la cessation du contrat de travail».

Les 2 salariés sont licenciés le 23 mars 2004 avec dispense d'exécution de leur préavis de trois mois, les salariés ont saisi la formation prud'homale de référé de diverses demandes.

La Cour d’appel, dans son arrêt du 28 juin 2005, rendu en référé, a notamment condamné l'employeur à leur payer une somme à titre de provision sur le solde de l'indemnité contractuelle de rupture, et dit que la clause de non-concurrence avait pris fin le 25 mars 2005.

Mais les salariés se pourvoient en cassation afin d’obtenir le paiement  d'un complément d'indemnité de non-concurrence et dommages-intérêts pour allongement abusif de la clause de non-concurrence.

La Cour de cassation donne raison aux salariés, estimant que la clause de non-concurrence commence à s’appliquer à la date de notification du licenciement et non à l’expiration du préavis comme le prétendait l’employeur dans cette affaire.

Cour de cassation 22/06/2011 Pourvoi 09-68.762 FS-PB

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