Pas de modification d’une partie variable du salaire sans accord du salarié

Jurisprudence
Contrat de travail

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Un salarié est engagé à compter du 29 août 2003 en qualité de chef des ventes, statut cadre, sur la base d'une rémunération fixe complétée par une rémunération variable composée de diverses primes.

Le 1er janvier 2005, il est promu aux fonctions de directeur commercial avec augmentation de sa rémunération.

Plus précisément, sa rémunération passe ainsi de 3.200 € à 5.400 €, les primes d’objectifs étant supprimés par ailleurs.

Licencié pour motif économique le 3 août 2007, le salarié saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes portant notamment sur un rappel de primes.

Il estime en effet que suite à sa promotion, son employeur avait supprimé une partie variable de sa rémunération, ce qui constitue une modification du contrat de travail nécessitant l’accord préalable du salarié, ce qui n’avait pas été le cas en l’espèce. 

Extrait de l’arrêt :

qu'à compter du mois de janvier 2005, (…) est devenu directeur commercial de la société (…) et que la partie fixe de son salaire est passée de 3.200 euros à 5.400 euros, il n'est en revanche pas établi que les parties ont convenu de supprimer les primes auxquelles le salarié avait droit en vertu de la convention sur laquelle elles se sont accordées lors de l'embauche du salarié ;

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Grenoble dans son arrêt du 23 octobre 2014 donne raison au salarié.

Extrait de l’arrêt :

que, faute pour l'employeur de prouver le consentement du salarié à la modification de sa rémunération contractuelle, celui-ci est en droit de réclamer le paiement de ces primes, sans rechercher si l'augmentation corrélative de son salaire de base ne compensait la suppression de ces primes, ni déduire cette augmentation du montant des primes dues

Mécontent du présent arrêt, l’employeur décide de se pourvoir en cassation, mettant en avant le fait que nonobstant la suppression de la prime d’objectifs, le salarié avait bénéficié d’une augmentation de sa rémunération corrélativement à sa promotion au sein de l’entreprise.

Mais la Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rappelant que la modification d’un contrat de travail (ce que constitue la disparition de primes d’objectifs) nécessite l’accord préalable du salarié, peu importe que la suppression desdites primes soient éventuellement compensées par une augmentation de la rémunération.

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a relevé que la disparition de la partie variable de la rémunération était constitutive d'une modification du contrat de travail nécessitant l'accord du salarié, a, sans être tenue de s'expliquer spécialement sur les pièces qu'elle entendait écarter, légalement justifié sa décision ;

Cour de cassation du , pourvoi n°15-10116

Une fois encore, le présent arrêt met en avant l’importance du fait de savoir distinguer une modification du contrat de travail et une modification des conditions de travail.

Modification du contrat de travail

La modification du contrat de travail consiste à modifier un élément essentiel ou jugé essentiel.

Exemples d’éléments considérés par nature comme « essentiels » : 

  • La rémunération contractuelle (y compris les accessoires de la rémunération comme un avantage en nature) ;
  • Le lieu de travail dans la mesure où il se situerait dans un secteur géographique différent, sous réserve d’une clause relative à un lieu de travail ;
  • La durée de travail (comme l’augmentation de la durée du travail contractuelle, quand bien même elle conduirait à une augmentation de la rémunération, notion à ne pas confondre avec le fait d’effectuer des heures supplémentaires) ;
  • Une modification de la qualification professionnelle ;
  • L’affectation à un poste de nuit. 

La modification des conditions de travail

La modification que souhaite apporter l’employeur ne porte pas sur un élément jugé « essentiel » dans le contrat de travail.

Le salarié est alors tenu de l’accepter, sauf bien entendu s’il s’agit d’un salarié protégé.

Conséquence refus salarié 

Le refus par le salarié constitue alors une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que, la bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n'ont pas à rechercher si la décision de l'employeur de faire jouer une clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail est conforme à l'intérêt de l'entreprise ; qu'il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ; que, nonobstant un motif erroné faisant état de la nécessité pour la société (…) de démontrer que sa décision d'appliquer la clause de mobilité était conforme à l'intérêt de l'entreprise, il ressort d'autres motifs, propres ou adoptés, que les conditions dans lesquelles la décision relative à la mutation avait été prise procédaient d'une précipitation suspecte vis-à-vis d'une salariée ayant une telle ancienneté et qui, peu de temps avant, avait fait l'objet de deux avertissements fondés sur des griefs non établis ; que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; 

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 23 février 2005 N° de pourvoi: 04-45463 

Le refus du salarié ne constitue pas à lui seul une faute grave, selon un arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2005.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que la cour d'appel a exactement décidé que le refus par un salarié d'un changement de ses conditions de travail, s'il rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave ;

Que le moyen ne peut dès lors être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 mai 2005 N° de pourvoi: 03-41753

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