Le licenciement pour faute n’est pas licite si les erreurs sont liées à un état de santé

Jurisprudence
Licenciement

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Une salariée est engagée le 24 juin 1999 en qualité de préparatrice en pharmacie.

Le 2 novembre 2009, elle fait l’objet d'un avertissement.

Convoquée le 23 novembre 2009 à un entretien préalable à son éventuel licenciement, qui se déroule le 3 décembre 2009, elle est licenciée pour motif disciplinaire le 26 décembre 2009.

Contestant son licenciement, la salariée saisit la juridiction prud'homale. 

A l’appui de sa demande, elle invoque le fait que son employeur avait connaissance d’un lien entre le manque de vigilance reproché au salarié et son état de santé, preuve en était que cet employeur avait saisi le médecin du travail pour qu’il examine l’aptitude de la salariée à son poste.

Signalons que le médecin du travail avait d’ailleurs conclu à son aptitude, sans réserves. 

Dans cette affaire, la cour d’appel puis la Cour de cassation donnent raison à la salariée, rejetant le pourvoi formé par l’employeur.

Il est ainsi rappelé que l'employeur avait conscience d'un lien entre le manque de vigilance de la salariée et sa pathologie, de ce fait le licenciement prononcé en raison des erreurs en question était sans cause réelle et sérieuse. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que la cour d'appel, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, qui a relevé, par motifs propres et adoptés et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation que les erreurs reprochées à la salariée étaient en lien au moins partiel avec la pathologie dont elle souffrait et que l'employeur avait conscience d'un lien entre le manque de vigilance de la salariée et sa pathologie, a décidé que le licenciement prononcé en raison des erreurs en question était sans cause réelle et sérieuse ; qu'elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-26697

C’est une affaire assez particulière que nous commentons aujourd’hui, et qui nous permet de se poser plusieurs questions.

Que pouvait faire l’employeur dans le cas présent ?

Conscient de la relation entre l’état de santé de la salariée et son manque de vigilance, l’employeur avait dans un 1er temps procédé à une « mesure de précaution » en sollicitant la médecine du travail.

Suite à l’avis d’aptitude prononcé par ce dernier, il aurait peut-être été judicieux de sa part d’exercer un recours contre cette décision, se plaçant alors dans la position envisagée par le Code du travail dans son article L 4624-1, avant de lancer la procédure de licenciement qui s’est avérée dans le cas présent… risquée ! 

Article L4624-1

Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs.

L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.

En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. 

Prononcer un licenciement non disciplinaire ? 

Dans un premier temps, il est bon d’avoir pleinement conscience du poste occupé par la salariée, en l’occurrence «préparatrice en pharmacie ».

Les erreurs en l’espèce peuvent être lourdes de conséquence. 

La question que nous pouvons nous poser est de savoir s’il n’aurait plus judicieux de placer l’éventuel licenciement sur un champ qui ne soit pas disciplinaire, pour ne pas risquer de voir requalifier le licenciement en « licenciement sans cause réelle et sérieuse »  comme dans le cas présent ? 

Sans aucune certitude, et sans préjuger d’un éventuel contentieux, il aurait peut-être été possible d’invoquer des « troubles causés par l’attitude de la salariée au sein de l’entreprise » ou « d’un manque de confiance »… 

Vous le constatez en lisant nos commentaires, l’attitude de l’employeur n’était pas aisée dans le cas présent, et comme toute jurisprudence l’arrêt présent soulève de nombreuses questions d’interprétation à l’heure où nous sommes sur le point de fixer des valeurs plafonnées aux indemnités versées en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse…

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