Contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence : elle est due même si l’entreprise n’existe plus !

Jurisprudence
Clause non concurrence

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Une salariée est engagée le 4 mai 2010 en qualité de vendeuse dans un commerce de chaussures.

Son contrat de travail comporte une clause de non-concurrence d'une durée de 3 ans en contrepartie de laquelle l'intéressée percevait, après la cessation effective de son contrat, et pendant toute la durée de cette interdiction, une indemnité égale à 25 % de la moyenne mensuelle du salaire perçu au cours de ses 3 derniers mois de présence dans l'entreprise.

Son contrat de travail prend fin le 20 avril 2011, et son employeur fait l’objet d’un jugement de de liquidation judiciaire le 27 septembre 2011.

La salariée saisit la juridiction prud’homale, d’une demande de paiement de la contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence.

Précisons que cette demande est dirigée de ce fait contre le mandataire ayant procédé à la liquidation judiciaire de l’entreprise et contre les AGS. 

Dans un premier temps, la cour d’appel déboute la salariée de sa demande, estimant que cette dernière n’était plus tenue à une quelconque d’obligation de non-concurrence à l’égard d’une entreprise qui n’existait plus ! 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en paiement de la contrepartie financière à l'obligation de non-concurrence, l'arrêt, après avoir relevé que le contrat de travail avait pris fin le 20 avril 2011, retient que l'intéressée calcule l'indemnité qui lui serait due sur trois années, la présente décision intervenant seulement un an après, et que l'employeur ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire le 27 septembre 2011, elle n'est plus tenue à une quelconque obligation de non-concurrence à l'égard d'une entreprise qui n'existe plus ; 

La Cour de cassation rejette totalement l’argument de la cour d’appel, casse et annule l’arrêt rendu par celle-ci.

La cessation d'activité ultérieure de l'employeur n'avait pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non-concurrence, de sorte que la contrepartie financière était due, bien entendu au prorata de la durée d’exécution de l’obligation de non-concurrence, c’est-à-dire au titre de la période pendant laquelle la salariée la respecte.

Extrait de l’arrêt :

Attendu, cependant, que la clause de non-concurrence prenant effet à compter de la rupture du contrat de travail, la cessation d'activité ultérieure de l'employeur n'a pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non-concurrence ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la salariée n'avait pas été libérée de son obligation par l'employeur et qu'il lui appartenait, en conséquence, d'examiner la demande en paiement de la contrepartie financière au prorata de la durée d'exécution de l'obligation de non-concurrence, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande en paiement de la contrepartie financière à l'obligation de non-concurrence, l'arrêt rendu le 7 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-26374

Ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation aborde cette clause particulière du contrat de travail, que constitue la « clause de non-concurrence ». 

Afin d’avoir une vision claire de cette clause, nous vous proposerons la présentation synthétique et pragmatique suivante : 

Principe et objectif

Cette clause a pour but d'interdire au salarié, après la rupture de son contrat, l'exercice d'une activité qui porterait préjudice à son ancien employeur.

5 conditions cumulatives

Pour qu’elle soit valide, cette clause doit répondre cumulativement aux 5 conditions suivantes :

  1. Elle doit être insérée clairement dans le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires) ;
  2. Elle doit respecter les dispositions conventionnelles si celles-ci sont plus favorables ;
  3. Elle doit nécessairement être justifiée par l'intérêt de l'entreprise et ne pas empêcher le salarié de retrouver un emploi ;
  4. La clause de non-concurrence doit être limitée : dans le temps (pas de durée illimitée), dans l’espace (lieux géographiques), dans l’objet (nature de l’activité) ;
  5. La clause de non-concurrence doit comporter une contrepartie financière (non « dérisoire »).

Que se passe-t-il à la rupture du contrat de travail ?

2 cas peuvent se rencontrer : 

  • Cas numéro 1 : 

L’employeur peut « lever » la clause de non-concurrence lors du départ de son salarié (en pratique, cela se produit assez souvent).

Aucune contrepartie financière n’est alors réglée et le salarié n’est en aucune façon liée par la clause.

Cette renonciation doit nécessairement être prononcée dans le délai prévu par la Convention collective ou le contrat de travail.

  • Cas numéro 2 : 

Si l’employeur ne libère pas le salarié de sa clause de non-concurrence, il doit alors régler au salarié les sommes prévues par la clause, au titre de contrepartie financière.

Nature contrepartie financière

Ces sommes sont considérées comme des salaires, soumises à toutes les cotisations sociales et imposables au titre de l’impôt sur le revenu.

L’employeur doit aussi régler les congés payés correspondant, en pratique beaucoup d’entreprise ajoutent une ligne supplémentaire calculée à 10% de la contrepartie financière en paiement des congés payés dus.

Date paiement indemnité

Elle est versée dès le départ effectif du salarié en cas de dispense de préavis.

Régime fiscal et social de l’indemnité

Comme nous l’avons indiqué précédemment, la compensation financière versée au titre de la clause de non concurrence a valeur de salaire.

Elle est donc :

  • Soumise aux cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS ;
  • Imposable au titre de l’impôt sur le revenu.

Selon la circulaire ARRCO-AGIRC du 7/11/2007 (circulaire 2007-19), l’indemnité doit être considérée comme une « somme isolée ». 

Cette indemnité n’ouvre pas droit à la réduction FILLON, voir notre article à ce sujet en cliquant ici.

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